Une claque. Pas le genre de claque qui t'envoie le cul par terre tout penaud et apeuré, pas le genre de claque qui t'achève, non. C'est une claque qui éveille, réveille, et donne envie de hurler. Hurler de rage, parce que le scandale est sous nos yeux, hurler avec passion parce que Laura Poitras fixe sa caméra sur l'héroïsme, le vrai, celui qui fait trembler les gouvernements les pays et les putain de plaques tectoniques.
Le documentaire ne s'appelle pas "Edward Snowden", même si son visage apparaît sur l'affiche, et ce n'est pas sans raison. "Citizen Four", c'est le nom de code qui sert à la fois de symbole, pour une idée sur laquelle je reviendrai plus bas, et une manière de montrer que contrairement à ce qu'on fait une grande partie des médias, il ne s'agit pas de parler de l'homme. Du moins, pas de la partie qui ne devrait compter : sa famille, son passé, sa compagne... tout ça, c'est du racolage. Ce qui compte, c'est le discours. Et des discours, il y en a trois : celui de Snowden, celui de Glenn Greenwald (le journaliste de The Guardian qui lui a servi de relais), et celui de la réalisatrice Laura Poitras, monteuse américaine qui vit à Berlin et a notamment beaucoup travaillé avec Tom Twyker (Run Lola Run, Cloud Atlas).
Mais Laura Poitras, c'est surtout une réalisatrice de documentaire avec un culot qui renverse des montagnes : depuis 15 ans, elle étudie et révèle l'Amérique post 11 septembre et s'est vue emprisonné à de nombreuses reprises. Elle commence à filmer en 2011 sur le sujet d'une surveillance volontaire des citoyens américains par la NSA, et les vingt-cinq premières minutes du documentaire y sont consacrées. On y voit des bases être crées, et surtout des affaires judiciaires où les représentants de la NSA nient en bloc toute opération de récupération de données massive, malgré des soupçons déjà assez grands pour mener à des affaires judiciaires. Voir ces images maintenant, après les révélations, ça fait bien rire sa mère. Mais bien jaune le rire hein, faut pas croire.
Ce n'est seulement après cette introduction que Snowden apparaît enfin. Ses mots sont déjà lus et entendus dès le début du documentaire, histoire de créer l'attente... et celle-ci est bien récompensée. Car il s'agit là du cœur du film, toute ces quarante minutes d'images environ dans la chambre d'hôtel à Hong Kong. Laura Poitras fait partie des deux personnes, avec Glenn Greenwald, à avoir été contacté par Snowden pour mettre en place les révélations. Nous découvrons donc les entretiens qui ont duré une semaine, comme si nous y étions. Et c'est vraiment ça, on a le sentiment d'être dans la chambre avec eux et de découvrir au fur et à mesure... c'est à ce moment que le film se transforme en fiction d'espionnage. Il n'y a rien de plus réel, et pourtant on a l'impression de voir Six Days of Condor, The Conversation ou All The President's Men... sauf que c'est la vraie vie. Quand une alarme incendie se déclenche à plusieurs reprises à leur étage, on se prend à devenir paranoïaque avec eux, et il faut se pincer pour se rappeler que tout ça est réel. Snowden lit par exemple un mail de sa compagne restée aux USA (et qui n'est pas au courant de ses actions à venir), qui lui apprend que leur propriétaire lui demande de se signaler pour un paiement non effectué (malgré le fait qu'ils soient tous réglés par virement automatique) et qu'il y a plein de camions d'une entreprise du bâtiment dans leur rue...
Durant les entretiens, Snowden parvient à montrer tout de suite qu'il est incroyablement préparé. Toutes ses décisions sont mûrement réfléchies, ses convictions sont clairement établies : cela n'a rien de personnel, il essaie de faire en sorte de pouvoir manipuler la manière dont l'information va sortir pour éviter que les médias se concentrent uniquement sur lui... ce qui compte, c'est le message. Et là c'est raté, comme nous l'avons tous vu... l'ironie est telle qu'Oliver Stone est déjà en plein tournage du biopic. Car malgré sa volonté de disparaître derrière le scandale qu'il révèle, ce que le documentaire montre aussi c'est la puissance de ce héros. Oui, j'ose l'appeler ainsi, je prends partie et je l'assume ; sa manière de parler, sa planification, son intelligence apparente sont émanents, et c'est lui qui fait la force du documentaire. Lui et les journalistes, cloîtrés dans leur petite chambre, terrorisés mais déterminés à sacrifier leurs vies pour révéler ce qui mérite de l'être, sont filmés sans aucune prise de position, avec une authenticité exemplaire, et ce qui en ressort, c'est ça : de l'héroïsme, du vrai. Et c'est pour cela que malgré les horreurs que révèle le documentaire (notamment l'échec total de l'attaque envers le système de surveillance britannique, pour cause de pression du gouvernement sur The Guardian), on en ressort avec une lueur dans les yeux. Estomaqué certes, mais aussi rassuré. Rassuré de savoir qu'il y a encore des hommes et des femmes qui n'ont pas peur de se prendre pour des héros comme s'ils étaient dans un film hollywoodien de Robert Redford et d'Alan Pakula.
Mais Laura Poitras, c'est surtout une réalisatrice de documentaire avec un culot qui renverse des montagnes : depuis 15 ans, elle étudie et révèle l'Amérique post 11 septembre et s'est vue emprisonné à de nombreuses reprises. Elle commence à filmer en 2011 sur le sujet d'une surveillance volontaire des citoyens américains par la NSA, et les vingt-cinq premières minutes du documentaire y sont consacrées. On y voit des bases être crées, et surtout des affaires judiciaires où les représentants de la NSA nient en bloc toute opération de récupération de données massive, malgré des soupçons déjà assez grands pour mener à des affaires judiciaires. Voir ces images maintenant, après les révélations, ça fait bien rire sa mère. Mais bien jaune le rire hein, faut pas croire.
Ce n'est seulement après cette introduction que Snowden apparaît enfin. Ses mots sont déjà lus et entendus dès le début du documentaire, histoire de créer l'attente... et celle-ci est bien récompensée. Car il s'agit là du cœur du film, toute ces quarante minutes d'images environ dans la chambre d'hôtel à Hong Kong. Laura Poitras fait partie des deux personnes, avec Glenn Greenwald, à avoir été contacté par Snowden pour mettre en place les révélations. Nous découvrons donc les entretiens qui ont duré une semaine, comme si nous y étions. Et c'est vraiment ça, on a le sentiment d'être dans la chambre avec eux et de découvrir au fur et à mesure... c'est à ce moment que le film se transforme en fiction d'espionnage. Il n'y a rien de plus réel, et pourtant on a l'impression de voir Six Days of Condor, The Conversation ou All The President's Men... sauf que c'est la vraie vie. Quand une alarme incendie se déclenche à plusieurs reprises à leur étage, on se prend à devenir paranoïaque avec eux, et il faut se pincer pour se rappeler que tout ça est réel. Snowden lit par exemple un mail de sa compagne restée aux USA (et qui n'est pas au courant de ses actions à venir), qui lui apprend que leur propriétaire lui demande de se signaler pour un paiement non effectué (malgré le fait qu'ils soient tous réglés par virement automatique) et qu'il y a plein de camions d'une entreprise du bâtiment dans leur rue...
Durant les entretiens, Snowden parvient à montrer tout de suite qu'il est incroyablement préparé. Toutes ses décisions sont mûrement réfléchies, ses convictions sont clairement établies : cela n'a rien de personnel, il essaie de faire en sorte de pouvoir manipuler la manière dont l'information va sortir pour éviter que les médias se concentrent uniquement sur lui... ce qui compte, c'est le message. Et là c'est raté, comme nous l'avons tous vu... l'ironie est telle qu'Oliver Stone est déjà en plein tournage du biopic. Car malgré sa volonté de disparaître derrière le scandale qu'il révèle, ce que le documentaire montre aussi c'est la puissance de ce héros. Oui, j'ose l'appeler ainsi, je prends partie et je l'assume ; sa manière de parler, sa planification, son intelligence apparente sont émanents, et c'est lui qui fait la force du documentaire. Lui et les journalistes, cloîtrés dans leur petite chambre, terrorisés mais déterminés à sacrifier leurs vies pour révéler ce qui mérite de l'être, sont filmés sans aucune prise de position, avec une authenticité exemplaire, et ce qui en ressort, c'est ça : de l'héroïsme, du vrai. Et c'est pour cela que malgré les horreurs que révèle le documentaire (notamment l'échec total de l'attaque envers le système de surveillance britannique, pour cause de pression du gouvernement sur The Guardian), on en ressort avec une lueur dans les yeux. Estomaqué certes, mais aussi rassuré. Rassuré de savoir qu'il y a encore des hommes et des femmes qui n'ont pas peur de se prendre pour des héros comme s'ils étaient dans un film hollywoodien de Robert Redford et d'Alan Pakula.
Car Snowden dans ce film, c'est Captain America. Le président Barack Obama aura beau dire que ce n'est pas un patriote, il a au contraire fait ce qu'il lui semblait être juste, et ce qui est dans la plus droite lignée de Thoreau et des transcendantalistes, des héros fictifs patriotiques comme Captain America. Et c'est là où les mots deviennent amusant, puisque Snowden espère voir les médias se concentrer sur le scandale mais aussi revendiquer sa position, se présenter au monde, pour servir de modèle, montrer qu'il n'a pas peur. Ainsi, il espère inspirer d'autres comme lui à réagir, et prendre sa place une fois qu'il sera attaqué de toutes part... et c'est ainsi que le véritable Captain America se compara à l'hydre, et à raison : quelques mois après, Glenn Greenwald vient informer Snowden par messages sur feuilles de papier (film d'espionnage je vous dis) qu'un homme s'apprête à leaker des informations sur les cibles des drones américains. L'héroïsme n'est pas mort, et ce documentaire est un monument à sa gloire.
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