Le cinéma est grand, il est beau et il est fort. Qu'est-ce que c'est que ce film ? Non mais qu'est-ce que c'est que cet oeuvre de frappé ?
Mathieu Amalric joue, pour la deuxième fois, le Dedalus d'Arnaud Desplechin. Ici, il vit une mésaventure banale qui lui rappelle trois souvenirs qui vont ainsi faire la structure du film. Déjà en cela, le film crache à la gueule des conventions scénaristiques puisqu'il intègre trois récits au coeur d'une intrigue plus générale, sans forcément les résoudre pour de bon. Dès les premières minutes,
Trois Souvenirs de ma Jeunesse, présenté dans la sélection de la Quinzaine des Réalisateurs au festival de Cannes, n'a rien de commun. Il traite les souvenirs et les liens des histoires un peu trop comme la vie, et pourtant n'en a que faire d'un point de vue formel puisque sa mise en scène, ses dialogues (oh mon dieu) et sa direction artistique dégoulinent d'un romanesque romantique mourant.
Les trois souvenirs sont déclenchés, à différents degrés, par le retour de Dedalus en France, et sa rencontre avec les services secrets qui le suspectent d'avoir été un agent double communiste (ah mais carrément). Ainsi, après un souvenir d'enfance, celui de la mère folle à lier et des traumatismes infantiles, Dedalus raconte à André Dussolier - oui oui, il est dans le film. "Participation amicale" selon le générique - pourquoi on pourrait effectivement croire qu'il a trahi son pays pendant la guerre froide...
Ainsi est déclenché le deuxième souvenir, qui donne donc lieu à un moment de cinéma d'espionnage hyper étrange où deux lycéens se trouvent embarqués dans de la transmission d'argent à Moscou. C'est démentiel, c'est drôle, c'est géant. Et de fil en aiguille, on en arrive au troisième souvenir, qui est le cœur du film à la fois dans sa susbtance, sa qualité et dans sa durée. Dedalus se souvient de son premier amour, il se souvient d'Esther. Elle était belle, il était beau, ils étaient jeunes, ils étaient pauvres. C'est alors que débarque un jeune acteur de 21 ans, inconnu au bataillon, et qui SANS DECONNER joue comme s'il était dans
Le Pokémon Magique. Vous ne connaissez pas
Le Pokémon Magique ? Googlez-le. Je vous jure, c'est incroyable. Ses mots et son jeu sont dans un décalage absolument délicieux, et cela colle tout à fait à l'esprit romanesque de cette idylle meurtrie.
Une scène, qui résume le tout ; Dedalus débarque dans son ancien lycée, retrouve ses amis et sa famille. Ce ne sont que rires et répliques improbables (on parle de son petit frère, très croyant, qui s'apprête à braquer une banque par exemple), et puis Esther arrive. L'écran se scinde, et plusieurs images apparaissent ici et là. La bande de potes, la voiture, Esther. Puis tout le monde s'en va, et Dedalus décide de rester un peu. Il allume une cigarette. L'écran est scindé, d'un côté le visage d'Esther, de l'autre Dedalus, et en dessous, la voiture qui s'éloigne. Puis le fragment d'Esther grandit et chasse le reste ; il n'y a plus qu'elle. Dedalus va alors entreprendre de la draguer en expliquant qu'il ne sait pas parler aux filles, et lui propose de venir chez lui pour apprendre à jouer au Go.
Dans ce cinéma, tout est beau. La langue, les sons des mots, les couleurs, les acteurs, l'actrice, les larmes, les colères, les face-caméra, les digressions. Tout est beau, et Arnaud Desplechin a réalisé une merveille.
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