Un cinéma, deux salles, deux séances, deux expériences diamétralement opposées.
Les Minions. Après avoir vampirisé les films de Moi, Moche et Méchant, c'est-à-dire après avoir été de très bons personnages secondaires dans le premier film puis vider le second de toute sa substantifique moelle en lui volant toute son intrigue pour lui préférer des gags enfantins (dont je ne critique pas la réussite indépendante), les américains d'Universal ont décidé de charger Pierre Coffin, co-réalisateur des deux opus précédents, et les équipes d'animation française, de faire un film uniquement sur les Minions. Ce à quoi je dirai tout d'abord : si leurs scènes sont si bonnes dans le deuxième film et qu'on ne demande qu'à les voir plus, c'est parce que l'intrigue principale est un caca de mammouth obèse. Après avoir eu un film pour enfants où on a le courage de montrer un papa élever des enfants seul, on nous fait toute une intrigue sur le fait que les petites filles ne seront pas réellement heureuses tant qu'elles n'auront pas de maman ? Et bah si c'est pas déprimant comme morale à la con ça. Mais passons.
Donc, les Minions, c'est toujours français mais sans le dire pour plaire au plus, et cela raconte la quête absurde de ces petits êtres jaunes qui depuis l'état de cellule tentent de servir le plus bad des méchants. Là un point sur la voix-off du début du film, qui fait très américain ; mais, vous faîtes pas confiance aux animateurs que vous employez ? Pire, vous prenez les enfants pour des abrutis ? Enlevez la voix-off on comprend vraiment tout ce qu'il se passe, parce qu'ils savent raconter une histoire là... mais bon au moins après ça s'arrête. Bon je ne vais pas en dire grand chose, personnellement je n'accroche pas. Je trouve les gags très enfantins et les références à 1968, l'année où se passe le film, un peu faciles malgré certaines qui m'ont plutôt séduites (la reprise de Hair en langage Minion par exemple), et voilà je sais pas, ça m'ennuie. Mais cela fera certainement un carton et éclatera Vice-Versa au box office français, parce que la vie c'est de la merde. Je me souviendrai cependant d'une séquence franchement tarée avec une famille pas habituelle en plein road trip, ça c'était vraiment drôle, et un point de scénario très bien trouvé qui implique la légende du Roi Arthur.
Et puis on quitte la salle pleine de mômes et d'adolescents morts de rire pour rejoindre une petite salle vide pour Microbe et Gasoil. Oui, le nouveau film de Michel Gondry, sans doute le réalisateur français le plus admiré outre-mer et méconnu et mal aimé dans son pays, se joue dans mon cinéma juste pour une seule personne. Surprenant ? Pas trop, mais vu l'échec commercial cuisant de son dernier film, l'excellente adaptation de L'Ecume des Jours de Boris Vian, on peut s'inquiéter quant à la suite de sa carrière... enfin, il pourra toujours retourner aux USA et pondre des merveilles en tout genre comme il l'a fait auparavant, là-bas au moins les studios semblent avoir envie de le vendre et le promouvoir... là son film est sorti mercredi, il a eu un trailer diffusé quelques jours la semaine dernière et aucune affiche dans le métro, franchement ça rend un peu triste des yeux.
Microbe et Gasoil, c'est l'histoire d'une amitié entre deux garçons un peu trop différents pour être bien dans leur peau au collège. L'un est timide, petit, efféminé et artiste, l'autre est intelligent, excentrique, et déjà classe (mais pas aux yeux de collégiens, qui sont les créatures les plus viles de la terre), et ensemble ils vont vivre de grande chose dans une France atemporelle. L'histoire se passe en 2014 mais tous deux sont déconnectés de la technologie moderne et préfère bricoler à l'ancienne (ça ne vous rappelle pas un certain Michel Gondry dans sa manière d'approcher le cinéma et la fabrique des rêves ça ? Si ? Ben, c'est normal, c'est fait exprès). Ils vont même - c'est un peu le propos du film - se fabriquer une voiture-maison et se barrer avec pendant les vacances d'été.
Le film est drôle, absurde (le côté amateur des acteurs y jouent aussi beaucoup, ça Gondry semble beaucoup l'apprécier depuis son magnifique The We and The I, entièrement tourné avec des lycéens américains du Bronx), et surtout triste et touchant au final. Certains dont moi se reconnaîtront dans cette oeuvre et y verront leurs angoisses, leurs blessures passées qui ne passent jamais vraiment. Et ils y verront les moments de gloire, de beauté. Le plus troublant est sans doute la manière dont tout le monde semble ignorer volontairement la souffrance des autres, que ce soit les enfants, ou les adultes (mention spéciale au dentiste...). Le tout est magnifié par les dix dernières minutes du film, qui sont à la fois sont originales par leur utilisation Communityesque du montage cinéma en y ajoutant un côté rationnel (pour être plus clair : le film utilise les coupes pour symboliser l'état de santé d'un personnage), et par le moment et la manière dont le rideau tombe. Une idée de regret, un souvenir de grandeur, un mélange amer. Microbe et Gasoil est un grand film, très évidemment personnel (dans le sens d'autobiographique mais sans le côté... autobiographique) et Gondry est beau, point final.
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