mardi 6 octobre 2015

Sicario : Et le monstre s'en prit à la Bête

Il m'est impossible de ne pas parler du nouveau film de Denis Villeneuve sur ce blog. Bon, non, pas littéralement évidemment, il ne faut pas croire que quelqu'un me tient en joue actuellement et m'ordonne d'écrire sous peine de perdre ma vie, car de toute façon même dans ce cas il me serait possible de ne pas en parler. Je serais mort, mais ce serait possible. M'enfin, toujours est-il que ce blog a commencé par un article sur son précédent film Prisoners, alors voilà voilà les ptits chats, qu'en est-il maintenant ?


Sicario, présenté à Cannes et rentré bredouille, selon Premiere parce qu'il avait trop de liens avec les membres du jury (Un acteur fétiche en Jake, les frères Coen qui partage le même directeur de la photo - le meilleur - Roger Deakins, un compatriote en Xavier Dolan, un ami proche en Guillermo Del Toro...), selon les Cahiers parce que le film est raté. Ne soyons pas si décisifs, cessons d'écouter les autres et faisons-nous un peu notre avis. Donc voici le mien :


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Ouais. J'ai un petit problème, je n'arrive pas à savoir quoi penser de ce putain de film. C'est-à-dire que je suis extrêmement mitigé, pas dans un sens où tout m'a semblé terne mais dans le sens où certains éléments m'ont subjugués tandis que d'autres m'ont laissé de marbré. Sicario raconte comment une agent de police - Emily Blunt - se retrouve embarquée aux côtés de la CIA dans une opération liés aux cartels mexicains. Le film se construit alors autour d'un trio complexe entre la policière réglo qui se retrouve désemparée et fauchée par l'horreur abjecte de leur entreprise diaboliquement nécessaire, un flic insupportable jouer par l'éternel insupportable Josh Brolin, et enfin un mexicain mystérieux et terrifiant, campé par Benicio del Toro.


Le problème majeur selon moi, c'est qu'il est difficile de voir où Villeneuve veut en venir avec tout ça. Le monde est dur, le monde est infect et affreux, il nous plonge dedans en nous forçant à nous questionner sur les opérations de la CIA tout en nous rattachant au personnage d'Emily Blunt qui perd sa féminité dans un monde d'hommes à grosses couilles qui puent. Mais au delà de ça... où allons-nous ? Et c'est là que le tout est surprenant, car je l'avais déjà dit au sujet de Prisoners, Villeneuve est tellement doué en mise en scène que c'en est limite pas permis. Le type devrait être interdit de réaliser des séquences comme celle des serpents dans Prisoners, celle du tunnel dans Enemy ou dans Sicario, celle de l'expédition au Mexique puis celle du tunnel et enfin toute la fin du film. Parce qu'il le fait avec tellement de puissance, que c'en est tout de suite impressionnant ! Et en plus, épaulé par le génie de Roger Deakins à la photo qui ne tombe dans aucun travers - ça c'est réservé aux porcs -, cela permet des séquences absolument géniales (de cette scène où les policiers vomissent chacun dans leur coin suite à leur découverte aux plans aériens des voitures de la CIA à la frontière). Mais pour dire quoi, là est le souci à mon sens. On verra bien comment il s'en sort avec le prochain, et pas des moindres puisqu'il doit réaliser la suite de Blade Runner. Ouais...


Malgré tout cela, il est toutefois délicieux de remarquer comment les obsessions et autres marottes s'installent au fur et à mesure de l'oeuvre de Villeneuve. Lui qui ne cesse de parler de l'Amérique le symbole, voilà qu'il l'étend au continent et continue de dépeindre la destruction de la famille et la vilaine et malsaine structure patriarcal qui règne en ces lieux. Dans Sicario, la famille est forcément cible de la violence, mais aussi son bouclier... que dire alors de la solitude terrible d'Emily Blunt et Benicio del Toro ? Vous le saurez en allant voir le film !

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