jeudi 2 avril 2015

Journal d'une femme de chambre : la parole vide de sens

Difficile d'arriver après Renoir et Buñuel. Journal d'une femme de chambre est un roman français d'Octave Mirbeau qui a fait beaucoup de bruit quand il est sorti, il y a 115 ans. Il donne la parole à une soubrette nommée Célestine, qui fait découvrir au lecteur par le biais de son quotidien et de ses souvenirs, les vices et les dessous de la bourgeoisie française. L'oeuvre a été adapté 4 fois au cinéma ; une fois en Russie en 1916, puis à Hollywood par Jean Renoir (mais oui mais oui. Jean Renoir a fait des films à Hollywood, et celui-ci est son meilleur), puis par Buñuel en France. Et maintenant Benoit Jacquot nous présente Léa Seydoux, qui succède à Jeanne Moreau, qui elle-même succédait Paulette Godard (la femme de Charlie Chaplin), sa Célestine à lui. En 1946, Jean Renoir avait fait de l'histoire de cette femme de chambre une fable sociale faisant écho au centenaire de la Révolution française, puis vingt ans plus tard Buñuel grossissait le trait sensuel et manipulateur du personnage ; qu'est-ce que Benoit Jacquot nous dit avec sa version ?


Rien du tout. Ou en tout cas, c'est le sentiment que j'ai eu en sortant du film. Une absence de communication complète, zéro catharsis, niet, que dalle. Bien sûr, le réalisateur a une approche et un style bien à lui d'un point de vue formel : les costumes et décors d'époque sont frappants parce que la caméra n'utilise aucun filtre. Pas de couleurs sépias en mode "youhou le passé", juste une image numérique très simple, avec même des plans en caméra épaule, c'est clair que ça surprend. Et puis il y a les zooms - et non travellings, ce qui laisse à penser que le budget du film ne devait pas être fantasque - qui envahisse chaque plan ou presque. Mais ce style personnel n'apporte rien du tout.


Benoit Jacquot a donc une réelle approche, personnelle, et il s'attaque à l'oeuvre de Mirbeau de front, en l'adaptant extrêmement fidèlement, avec analepses et occasionnels voix-off. Mais malgré cela, il n'y a rien à en tirer. On ressort sans avoir ressenti une quelconque prise de position vis à vis de ce qui est raconté, sans avoir trouvé un pied sur lequel danser... immense déception. Surtout qu'au vu des critiques, je suis un des seuls avec le journaliste des Cahiers à être resté de marbre face à cette adaptation. Dommage. Cela aura au moins été l'occasion de voir Léa Seydoux rayonner dans de superbes tenues, et Vincent Lindon jouer un homme à tout faire comme s'il était Mel Gibson dans Mad Max ; hé, ça marche. Il est tellement classe comme ça. Et une blague sur Mel Gibson se cache dans cette remarque, bonne chance pour la trouver !

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