dimanche 6 septembre 2015

Umrika, Isla Minima : Non, les deux films n'ont rien à voir

Deux derniers films que j'ai vu, et je n'ai pas vraiment le temps de m'étendre beaucoup et je n'ai pas énormément à dire, donc voilà, rapidement :

Umrika:


Un indien d'un petit village grandit dans l'ombre de son frère et de sa longue correspondance, parti vivre en Amérique. Lorsque son père meurt, il décide de partir à la recherche de son frère, et s'ensuit ici une série de déceptions. Le film est une étude scénaristique très classique sur un thème moins classique, la situation des immigrés clandestins, et le versant triste et affreux du rêve américain. Ce qui est fascinant, c'est que d'un point de vue structurel et stylistique, Umrika est extrêmement formaliste, c'est-à-dire qu'il adopte une manière de s'exprimer visuellement et rythmiquement qui est typiquement hollywoodienne. Au vu de son sujet, et de ce qu'il présente, c'est un paradoxe permanent et un peu dérangeant, qui se révèle perçant dans les dernières minutes du film, qui choisissent de ne pas montrer ce que le spectateur comprend déjà. Ainsi le hors champ et l'absence d'image devient le visuel le plus frappant du film, en s'appuyant uniquement sur l'inconscient collectif du public, et ça, c'est balaise.

Isla Minima:

Polar espagnol qui est globalement pareil que tout les polars. Deux enquêteurs débarquent dans une ville paumée pour enquêter sur la disparition de jeunes filles. L'un est jeune et prometteur, l'autre et vieux et cache un passé sombre. Au fur et à mesure du film, on découvre que l'affaire est plus complexe et tordue que ce que l'on croyait. Donc, pas très original mais cependant très bien fait, avec notamment une photographie des plus belles que j'ai pu voir cette année (mention spéciale à la scène totalement inutile filmée en magic hour avec les flamands roses). En réalité, Isla Minima utilise un contexte particulier et invite le spectateur à prendre de la distance sur des notions de bien ou de mal (notamment avec ses plans qui survolent la campagne déserte, qui font à la fois prendre conscience d'une autre perspective et plongent le spectateur dans l'immensité du vide), c'est celui de la fin de l'ère franquiste. Malheureusement, cela reste extrêmement en retrait jusqu'à la toute fin du film, qui seulement dans les dernières minutes nous force à revisiter toute l'histoire sous une autre perspective morale. Donc, sympa quand même.

Le Tout Nouveau Testament : Blasphème sur pellicule

Après le four gigantesque de Mr Nobody en 2006, qui a depuis acquis un certain culte, le réalisateur belge revient avec une nouvelle oeuvre bien barrée : la fille de Dieu, petite soeur de Jésus-Christ (JC pour les intimes), raconte comment son père, Dieu, a créé le monde depuis son bureau de son petit appartement infâme, et y déverse les pires horreurs. Un jour, elle décide de prendre les devants et de s'enfuir de l'appartement pour réunir 6 apôtres et bonifier le monde de son père, parce qu'en ajoutant 6 aux 12 de son frère ça fait 18, comme une équipe de baseball, et oui c'est important dans le film.



 Dans cette interprétation de la Bible, l'homme n'a jamais quitté le paradis. Ce paradis, c'est Bruxelles, et par ailleurs, ce n'est pas parce que c'est le paradis que ça n'est pas la grosse merde. Dieu Benoit Pooelvorde s'amuse à y balancer des lois à la con ("la file d'à côté avance toujours plus vite" et ce genre de conneries bien subtiles et profondes) pour faire souffrir les hommes, tandis que ses enfants font ce qu'ils peuvent pour n'être qu'amour. Oui, c'est une lecture extrêmement simpliste du Dieu juif et de la Trinité chrétienne, mais apparemment cela suffit pour sembler profond et faire rire parce que nom de Benoit Pooelvorde ce que ça rit dans la salle.



Vous aurez compris que je n'ai vraiment pas aimé ce film. Par ailleurs, je me suis souvenu en plein visionnage que je n'avais pas aimé Mr Nobody non plus, que j'avoue trouvé faussement malin, et là c'est un peu le même problème. Jaco Van Dormael est incroyablement inventif d'un point de vue visuel, c'est indéniable, et certains moments de scénario sont touchés par une sorte de grâce indéniable (l'idée de base des hommes sur terre qui découvrent le déterminisme en apprenant tous leur date de mort). Le problème, c'est que ces moments sont littéralement des instants, et que la majorité du film sombre dans le grossier, alors qu'il vise du grotesque. L'exemple par excellence étant Catherine Deneuve qui finit en couple avec un gorille ; cela se veut grotesque, mais ne parvient qu'à être grossier. Est-ce une critique humaniste du monde religieux ? Pas vraiment, étant donné que la religion, finalement, tellement amorphe et originale ici qu'elle ne semble pas être un commentaire sur quoi que ce soit de réel. Beaucoup de vent pour rien, au final.

mercredi 2 septembre 2015

Miss Hokusai : Naïveté sans reproches

Keiichi Hara est loin d'être un débutant en matière de réalisation, ça c'est clair. Après des décennies à bosser sur Doraemon et d'autres trucs pas exactement fascinants, il commence à sortir des long-métrages d'animation plus personnels, plus authentique bref plus cinéma. Miss Hokusai est le quatrième de ceux-là, et raconte quelques moments de la vie de la fille du célèbre peintre japonais Hokusai. Mais si, celui qui a peint la vague avec le mont Fuji derrière !


Le sujet est la première bonne surprise ; je ne savais pas que ce peintre avait une fille, qui elle-même était son assistante, et peintre elle-même et talentueuse et reconnue de surcroît ! Découvrir sa jeunesse, en pleine ère Edo en 1814, est un vrai bonheur. Plus qu'une trame soutenue, le film de Hara se structure autour de moments, qui ensemble forment un fragment de vie. Oui, ça sonne un peu cliché un peu mignon gentil mais... Miss Hokusai a beaucoup de cela, en réalité. On ressent dans le film et dans son traitement original une naïveté candide, qui a le mérite d'être sincère. Pendant à peine une heure et demie, on découvre la relation de Oï Katsushika (la fille) avec son père, leur relation d'artiste à artiste, ses rapports avec les hommes, et avec sa petite soeur malade et aveugle, à qui son père ne rend jamais visite. C'est cette dernière qui donne sa force étrange à l'oeuvre, et qui offre une candeur sans concessions qui saura séduire certains, tout comme elle m'a séduit moi. C'est extrêmement simple, mais voir cette fille de peintre, accompagnée de sa grande soeur elle-même artiste, être justement incapable de voir, cela fait naître quelque chose de fort et nous force à remettre en question nos propres perceptions.


L'autre grande qualité du film lui est lié, c'est son absence de pudeur quant à la formalité du style. Différentes approches d'animation se côtoient aussi, parfois très dynamiques et en mouvement, parfois plus statiques comme on est habitué à le voir du côté de chez Ghibli. Sans parler des visions et autres moments de grâce liés aux tableaux de Hokusai, qui eux aussi ajoutent une qualité aventureuse, et de la musique, tantôt traditionnelle tantôt rock moderne et ce sans la moindre raison. Non enfin je pense qu'il y a une raison, mais je ne l'ai pas trouvé et surtout je m'en fous, cela m'a séduit : Miss Hokusai ne se laisse pas limiter par les codes qu'il aurait pu s'imposer à lui-même en tant que film d'animation, et cela le rend d'autant plus séduisant.

lundi 31 août 2015

Dheepan : Jacques Audiard, l'éléphant du cinéma.

Bon, autant se le dire : le fait que moi, petit cinéphile à bulle, fasse un article sur la génialitude absolue du film qui a récolté la Palme d'Or à Cannes cette année, ne devrait pas avoir beaucoup d'impact. C'est-à-dire que trois des plus grands réalisateurs vivants à ce jour, les frères Coen et Xavier Dolan, puis un des maîtres les plus accomplis dans le cinéma, Guillermo Del Toro, sans parler de celui que j'ai désigné comme meilleur acteur américain Jake Gyllenhaal, mais aussi Sophie Marceau Rossy de Palma Sienna Miller et Rokia Traoré, ont tous décidé que ce film était celui qui mériterait d'entrer dans l'histoire.


Donc je ne vais pas m'étendre sur le fait que le film est plus qu'excellent. Sur la qualité d'une histoire, celle d'une famille fatalisée qui n'en porte que le nom, atrophiée car arrachée à sa culture jusqu'au point de ne pas pouvoir communiquer. Sur la grandeur d'un montage sans bavure et pourtant divinement rythmé, sur la violence montrée ou terriblement voilée, sur une caméra qui jamais ne filme parce qu'"on fait comme ça" mais toujours pour s'exprimer là où Dheepan et sa famille ne le peut pas... sur tout ça, je ne souhaite pas m'éterniser, ni vous convaincre. Voyez-le et vous comprendrez de vous-même la puissance de ce que Jacques Audiard a pondu.


C'est bizarre comme image, Jacques Audiard qui pond, mais pas autant que ce que lui raconte sur le film. En nous présentant son oeuvre aux Halles (ça a l'air classe comme ça mais c'était ouvert au public, non je ne vais pas aux projections presses, dans mes rêves), il nous a décrit le tout comme un origami en forme d'éléphant et qui quand on déplie, n'est que du papier froissé. Un film qui tremble, mais qui était censé trembler. Ouais, sans plus d'explication, on a du mal à le suivre, mais pensez-y : le pauvre, on a décidé qu'il parlait politique, faisait des films qui parlent de la société française, et du coup il y a controverse, alors il ne lui reste qu'à parler de la substance de son film avec des images un peu tarées, mais finalement pas absurdes. Attention, que certains médias avertis et instruits refusent sa filmographie à coups d'arguments bipèdes, comme ces messieurs de chez Stéphane Delorme, je comprends et j'accepte. Mais quand on voit les conneries qu'on peut lire dans la presse populaire et à la radio... oui, Audiard filme dans les cités, non il n'a pas grandi dans une cité, non il ne fait pas un film sur l'histoire coloniale de la France, le Sri Lanka c'pas vraiment français et ça fait partie du scénario par ailleurs sans déconner, non il ne tente pas de faire passer un message politique et putain ça crève l'écran et les yeux. Audiard raconte des histoires, et il le fait si bien qu'il nous plonge dans le réel du faux. Souvent, ça prête à confusion, mais sa démarche, contrairement à celle qui a menée à Samba, n'est faite d'aucun faux pas. Pour paraphraser Truffaut, le cinéma c'est un cocktail de vérité et de spectacle. C'est une définition parmi tant d'autres, mais qu'est-ce qu'elle sied à Jacques Audiard bordel. Je veux bien que l'expression "le meilleur réalisateur français" n'ai aucun sens, car je le pense aussi, et beaucoup mériteraient un tel titre, mais si on devait l'attribuer à quelqu'un, et que ce quelqu'un était Jacques Audiard, cela ne me dérangerait pas franchement.


Mais surtout, ce que je voulais dire sur ce film, et j'y pense puisque Martin Scorsese va venir le présenter au Forum des Images bientôt, c'est qu'en fait c'est totalement comme Taxi Driver. Voyons voir si vous êtes d'accord avec moi : c'est l'histoire d'un homme qui a été changé par la guerre. Le titre du film le désigne, mais ce n'est pas vraiment lui, c'est un surnom ou un nom d'emprunt qui décrit le fantôme qu'il est devenu. Dans l'histoire, il y a une femme, qui peut se rapprocher de lui puis se voir trahie par les cicatrices de sa folie. Il y a aussi une plus jeune fille à protéger, et des monstres, qui dérangent le monde. Et puis, à un moment, le film change de ton, et bascule dans la violence, graphique, masquée, visible, affreuse, morbide, choquante. Et puis il y a la fin ; le rêve, le fantasme perdu qui finit par peindre du sang coulé une toile qui dissimule l'âpreté de ce qu'elle cache. Taxi Driver et Dheepan se ressemblent énormément, à une différence majeure : celle de la compassion. Et en cela, Jacques Audiard ose ce que Martin Scorsese se permet rarement (mais le fait à merveille à chaque fois qu'il le fait), il parle de compassion, il n'a pas peur de l'aimer les monstres que les hommes ont créé.

dimanche 30 août 2015

Fant4stic : Non, ce n'est pas le pire film de super-héros de l'histoire de l'humanité vivante

Ouais, commençons par là. Tous ceux qui hurlent haut et fort que le reboot des Quatre Fantastiques "réalisé" par Josh Trank (oui, j'ai mis des guillemets, oui il y a une raison, oui je vais l'expliquer, patiente petit lecteur tiens prends ce magazine pour t'occuper) est le pire film de super-héros de l'histoire, tous ces gens-là, ont la mémoire plus courte que la bite de ta mère. Si jamais vous vous demandez, j'ai longtemps hésité à garder la phrase précédente, parce que même moi je trouve ça un peu abusé. Bref : Catwoman, Elektra, Howard The Duck, Superman IV: The Quest For Peace, Batman and Robin, Blade 3, X-Men The Last Stand, Ghost Rider 2, Underdog, Hancock, Kick Ass 2, Wolverine, et même Iron Man 2 (oui, je m'attaque au MCU, je suis sans peur et sans reproches) sont TOUS plus mauvais, chiants, décevants, que le reboot des Quatre Fantastiques. Et je devrais rajouter à la liste les deux films précédents des Quatre Fantastiques, qui sont absolument abominables, et mentionner par ailleurs le fait qu'un film intitulé Zorro The Gay Blade est sorti en 1981, dans lequel Don Diego de la Vega a un frère homosexuel. Cela ne sert à rien, mais c'est bien de le savoir. Tout comme il y a un film de Air Bud où cinq chiens deviennent des super-héros et défendent la planète Inspiron. Bon à savoir.


Donc, Fant4stic n'est pas mauvais. Pendant une heure, il est même très sympa. Mais, histoire de prouver à nouveau que nous avons la mémoire courte, les trente dernières minutes ahurissantes de connerie nous le font oublier comme par magie. Pas comme d'ailleurs, oser finir un film comme ça, après un début comme le sien, ça relève de la magie noire, celle qu'on utilise pour se faire s'effondrer des civilisations entières. Non, je ne crois pas à la magie, c'est pour l'image. N'essaie pas de me décrédibiliser, ça sert à rien, je suis déjà un nobody qui écrit un blog sur le cinéma, je ne peux pas être moins crédible ! Mais donc, pourquoi cet échec monumental ?


Je ne peux pas parler de ce film sans lui donner son contexte, à partir de ce que l'on sait. Fox a engagé Josh Trank, qui avait un seul film à son actif, et quel film nom d'une pipe de Gandalf mes amis. Chronicle, une plongée délicieuse dans ce qui fait qu'un homme devient un super-vilain. Ce film de super-héros à petit budget lui a donc permis d'être recruté, et au vu de ses intérêts, on pouvait s'attendre à ce que son approche des Quatre Fantastiques soit inhabituelle. Loin du côté rétro flashy des comics, Trank avait pour intention de se pencher sur des bêtes de foire et leurs traumatismes, des rebus de la société. Pas super original, mais sympa. Il faut admettre que c'est pourtant un contre-sens total, qui montre bien le problème du projet : Trank est à l'opposé de ce que les Quatre Fantastiques sont, c'est évident, alors pourquoi l'avoir engagé lui ?



La suite est déplorable : une semaine avant le début de tournage, Trank se voit forcé de retirer deux scènes majeures de son film. Pris par la panique et la colère, il commence à perdre la boule et se comporter n'importe comment. Il se prend la tête sur le tournage avec les acteurs, traite Kate Mara comme de la merde, manque de se fritter avec Miles Teller, devient incapable de prendre des décisions artistiques pour un film qu'on vient de lui saborder d'entrée. Les dirigeants de la Fox, qui ne comprennent pas pourquoi leur réalisateur perd pied, lui mettent tous sur le dos, racontent ses échecs à Disney qui le vire de son projet sur un film de Star Wars. Puis, ils le dégagent de son propre tournage et ne lui permettent pas d'avoir accès à la salle de montage. Quand le film est sorti, les acteurs ne l'avaient pas encore vu. Voilà voilà... le résultat, c'est qu'une petite heure de film est assez bien structurée et plaisante, et puis un saut dans le temps nous offre un film complètement différent, qui tente de ré-intégrer des éléments qui "plairont" aux fans, comme des répliques cultes, de l'action, et la fameuse scène de "la team trouve son nom". Quand le film sort, Josh Trank laisse entendre dans un tweet (et par "laisse entendre" je veux dire "exprime avec la subtilité d'un éléphant qui fait du break dance") qu'il n'a rien à voir avec ce qu'il voulait faire, signant ainsi, très probablement, son arrêt de mort à Hollywood.



Et pourquoi ? Pourquoi signe-t-il son arrêt de mort au final ? Parce qu'il fut un temps où les studios prenaient des risques, où le grand spectacle appelait une certaine folie créatrice au milieu de laquelle certains ont su se faire une marque et créer ce monde de divertissement dont ont besoin les producteurs et exécutifs pour subsister. Mais ce temps n'est plus, et c'est bien clair. Edgar Wright et Joss Whedon qui s'éloignent de Marvel, ainsi qu'Ava Duvernay, puis Disney qui engage Colin Trevorrow pour clore la nouvelle trilogie de Star Wars, James Wan pour Star Trek... la place n'est plus aux grands réalisateurs dans le monde du blockbuster, alors que ce sont eux qui l'ont inventé. Seulement, comme l'ont prouvé les chiffres de Jurassic World - pour ceux qui ne sont pas au courant, plus gros démarrage de l'histoire et 3e plus gros succès au box office de l'histoire du cinéma - qui franchement, a beau être sympa est quand même bien débile et pas mémorable, les studios n'ont pas l'air d'avoir besoin de grands films ou de grands auteurs. Ils s'en sortent très bien sans eux, et ça n'est pas triste, c'est terrifiant.

mardi 25 août 2015

Ted 2 : Toy Story

Si vous lisez ce blog régulièrement, vous savez sans doute que j'ai vu beaucoup de films. Je pourrais mentir, c'est vrai, mais dans ce cas je serai extrêmement bon menteur, et pourquoi je le ferai sur un site où cinquante personnes lisent les articles en moyenne ? Ce serait absurde. Et voilà donc le mot du jour, absurde, car je vous le dis, Ted 2 est un des films les plus incroyablement et immensément insensés qu'il m'ait été donné de voir en ma courte vie d'un quart de siècle.


Je ne cherche pas à le cacher, je suis démesurément fan de Seth Mac Farlane, l'homme qui écrit, réalise, et double Ted. Connu principalement pour ses sitcoms d'animation outrancières (Family Guy, American Dad) qui en foutent plein la tronche à absolument l'intégralité de la planète et souvent sans aucune raison, Seth est bien plus que ça, et je me permets de l'appeler par son prénom parce que je suis sûr que si on se connaissait, on serait potes. Ouais, ouais, c'est comme ça, Seth et moi tu peux pas test. Mais ce qui est moins connu, c'est que la voix de Ted est également un fan absolu de musique classique, de jazz et du Broadway classique, et qu'il chante comme Frank Sinatra. On peut le voir chanter avec des musiciens prestigieux dans le monde entier, et c'est grâce à sa passion et son obsession que Family Guy est une des rares séries télévisées à dépenser de l'argent pour avoir un véritable orchestre à jouer la bande originale chaque semaine. Ajoutons à cela qu'il est un des hommes les plus progressistes des Etats-Unis, aux opinions très affirmées sur la religion (il est athée), les droits des femmes (il voit les femmes comme des personnes), des LGBT (il les voit comme des personnes), sans parler de ses liens avec la science, comme l'en prouve son initiative (commune) de relancer la série Cosmos avec Neil Degrasse Tyson.


Donc, Mac Farlane est un homme complexe. Et pourtant, le premier Ted était simple, car il était con. Mais alors, franchement bien con, et bien marrant surtout, mais bien con tout de même. Et Ted 2 l'est aussi, bien sûr, faut pas déconner, mais pas que. En fait, ce serait trop dire que de l'appeler un film, parce que c'est bien trop bordélique pour ça. On retrouve les passages débiles, voire extrêmement débile (un bong en forme de bite, une giga baston entre nerds à une comic-con avec Kirk vs Picard vs Godzilla vs Son Goku vs la meuf du Cinquième Elément vs mille trucs, des poissons qui sautent hors de l'eau pour écouter la déesse Amanda Seyfried chanter oui c'est une déesse je l'aime tu me cherches), mais dans un rythme qui semble plus propice à l'animation télévisée, et pas à un vrai film. Surtout dans la manière dont les répliques vont s'enchaîner. On ajoute à cela une réflexion profonde (oui, profonde, dans Ted 2... oui) sur la notion de personne, avec un passage au tribunal qui n'a rien d'une blague et n'a rien à faire dans le film, ainsi que des questions de romantisme et BREF CE FILM JE LE COMPRENDS PAS OK ???? Je ne pense pas que ce soit un bon film. Mais ce n'est même pas un film. Peut-être que Seth MacFarlane est à un point où il ne sait plus où donner de la tête, comme le prouve cette séquence de générique de danse à la Busby Berkeley, sans aucun second degré. Je ne sais plus quoi dire. Plouf.

vendredi 14 août 2015

Mission Impossible Rogue Nation : Mission Réussie

Un peu de contexte tout d'abord : le cinéma d'été, le grand spectacle, c'est autant une expérience qu'un film, dans le meilleur des cas. Et ce depuis Les Dents de la Mer, film qui comme tout le monde le sait  est le premier blockbuster de l'histoire. Tiens d'ailleurs, je déteste cette phrase. Voyez vous donc, ceux qui ne savaient pas ce simple fait absolument pas essentiel à connaître se sentent humiliés par cela, et ceux qui le savent déjà se sentent rabaissés. C'est une belle phrase de prof bien pourrave, et si j'en parle maintenant c'est parce que j'aimerais la bannir. L'accrocher à un avion et la regarder s'éloigner. Un peu comme Tom Cruise dans Mission Impossible 5... Sauf que Tom Cruise ne s'en va jamais, et c'est tant mieux. Et soyons clairs sur nos termes ici, il y a deux Tom Cruise, l'affreuse personne et l'acteur/auteur exceptionnel et qui mériterait un article entier sur sa génialitude. Mais je ne vois pas pourquoi je l'écrirai, les Cahiers du Cinéma lui ont déjà dédié UN LIVRE ENTIER. Et il revient ici avec le cinquième opus des aventures de Ethan Hunt et sa bande. Mais avant d'en parler...


Vous êtes prêts pour une deuxième couche de contexte ? Cela solidifie un peu le propos avec une métaphore ridicule, merci merci. Je me trouvai au Japon ces derniers jours, et j'ai voulu en profiter pour connaître l'expérience du cinéma nippon. Car qui dit pays différent, dit coutumes et comportements différents. De plus, le Japon est extrêmement cinéphile. Ouais, le pays entier, je le stéréotype comme ça moi, les japonais dévorent des DVD crus avec leurs baguettes et mangent des pop-corn au wasabi. Non, plus sérieusement, le pays a une riche histoire cinématographique, et de nombreux cinémas dans sa capitale en atteste. Je m'y rendais à l'origine pour voir l'adaptation du manga Attack On Titan en film live, mais tout était complet. D'ailleurs, les japonais ont l'air d'avoir assez bien compris le sens du mot spectacle : le film était diffusé en IMAX ATMOS avec option Futuroscope, c'est-à-dire du vent de l'eau le sol qui tremble et tout et tout... bien dégoûté d'avoir raté ça.

Du coup je me suis rabattu sur le nouveau film de Mission Impossible, que je comptais voir de toute façon puisque j'adore cette saga dans son entier (oui même celui de John Woo qui est un peu naze), et qui plus est c'était une séance en DOLBY ATMOS, en gros un son calibré à 360° pour une meilleure immersion et spoiler, ça dépote méchamment. C'est quoi cette saga ? Ce sont des films ultra spectaculaires aux scénarios totalement insensés, tous réalisés par quelqu'un de plus ou moins méga cool, et avec des scènes d'actions et cascades démesurées et sans trucages, parce que Tom Cruise veut mourir. Tout a commencé avec Brian de Palma qui en a fait un thriller hitchcockien (que ceux qui sont surpris par cette information se lèvent. Personne ne se lève dans l'aéroport je vois qu'on est tous d'accord), puis John Woo y ajouté la stylisation de l'action, JJ Abrams de la profondeur et une richesse naissante des personnages secondaires. A partir du quatrième film, méticuleusement dynamisé par un habitué de l'animation - le cinéma calculé par excellence -, le talentueux Brad Bird, ce n'est plus Ethan Hunt le héros mais une véritable équipe. Christopher McQuarrie, ghost writer supposé de presque tous les films de Tom Cruise depuis 15 ans, mais aussi réalisateur du génial Jack Reacher, s'est retrouvé aux commandes du nouvel opus, et je ne pense pas trop m'avancer en disant qu'il a réussi à se trouver son propre souffle en intégrant un peu de ce qui a fait la qualité des quatre précédents. Petite liste rapide, dans l'ordre chronologique : une trahison d'un haut placé lié à l'affaire en place et une GROSSE référence à Hitchcock, Ethan Hunt en moto en pleine course poursuite, les masques ultra réalistes, référencés puis rappelés, puis enfin l'esprit fraternel des agents de l'IMF, avec notamment cette scène fantastique de déclaration d'amitié de Simon Pegg.


Mission Impossible Rogue Nation est, vous l'aurez peut-être compris, excellent. Des cascades insensées (la fameuse scène de l'avion en tête, qui petite anecdote pour la route a été tourné avant même d'avoir un script. D'ailleurs aucun film de Mission Impossible n'a été commencé avec un script en main... oui c'est vraiment n'importe quoi, oui les scénarios n'ont aucun sens, mais c'est assumé avec une telle aisance et surtout tellement jouissif qu'on ne va pas s'en formaliser), des retournements de situation, des méchants terrifiants, des belles histoires d'amitié, des trahisons, des détonateurs, des courses poursuites... et beaucoup de missions impossibles. L'essentiel, ce n'est pas de se dire "est-ce qu'ils vont s'en sortir ?" parce qu'on est certain qu'ils vont s'en sortir. Non, la question est "comment est-ce qu'ils vont s'en sortir ?" et la réponse est, dans ce film et ce jusqu'au climax, jamais décevante. Mais pour moi, la scène qui a fait le film est une tentative d'empêcher une tentative d'assassinat lors d'un opéra. Oui j'ai dit deux fois tentative, c'était une tentative de faire du style. J'ai pas le droit de tentativer ? Bref, cette scène est merveilleuse, on devrait l'appeler un Austrian stand-off, elle joue sur les différentes notions de spectacle est n'est pas sans rappeler un des meilleurs films de Hitchcock, The Man Who Knew Too Much. D'ailleurs, un des premiers plans de cette scène montre les instruments de musique, et au premier plan, des cymbales. C'est fait exprès, c'est absolument certain.


Ce film dépote, allez le voir. Et si vous êtes au Japon, allez le voir au Japon ! Comme ça, vous découvrirez que là-bas on est placés dans la salle, que les bande-annonces n'ont aucun sens (et qu'un film qui ressemble à une parodie de la parodie de Star Trek, Galaxy Quest, va sortir au Japon, avec Shun Oguri bitch please), et que 90% de la salle reste jusqu'à la fin du générique.