vendredi 30 janvier 2015

Une merveilleuse imitation du temps : The Theory of Everything / The Imitation Game

Comme pour confirmer ce que je disais au sujet des Nouveaux Héros dans une chronique de la semaine dernière, place aux scientifiques. Universal et les britanniques de FilmNation suivent le mouvement actuel - et logique - qui met en avant des hommes et femmes de science pour en faire nos héros. Ce qui n'est pas surprenant ; autrefois c'était les hommes politiques, les instituteurs, les pasteurs... le héros du monde moderne libéral, c'est le scientifique.


The Theory of Everything et The Imitation Game sont deux biopics (ce qui veut dire : on va vous raconter des faits historiques et jouer sur le poids émotionnel que cela apporte en plus) extrêmement classiques, parfaitement calibrés pour les cérémonies de remises de prix : des histoires belles et tragiques, des rôles principaux d'êtres inadaptés à la fois physiquement et psychiquement, et des comédiens et comédiennes mis en valeur. Mais classique ne veut pas forcément dire ennuyeux, sans saveur ; on peut faire les choses efficacement et toucher, raconter réellement quelque chose avec force, sans se démarquer de la norme. Les biopics sont sans doute l'exemple phare du classicisme cinématographique avec les films d'action, aussi se doivent-ils d'exceller pour ne pas être rapidement oubliés. Et ces deux films sont très bons ! Voilà c'est dit, vous pouvez passer votre chemin maintenant. Ou bien je continue ? Bon, ok !


The Theory of Everything (Une Merveilleuse Histoire du Temps) raconte la vie de Stephen Hawking, scientifique et star populaire qui souffre d'une maladie qu'il lui a laissé deux ans à vivre... il y a là des dizaines d'années. Le film se penche très peu sur la dimension professionnelle de sa vie, sur ses découvertes (peut-être parce que, somme toute, elles ne sont pas si importantes que cela ? Surtout comparé à Turing...), et préfère montrer l'évolution de sa vie avec sa femme (jouée par Felicity Jones, absolument éblouissante), qui doit s'occuper de lui au fur et à mesure que son état empire. D'ailleurs, il est adapté du livre de Madame Hawking, ce qui explique l'angle d'approche choisi. Felicity Jones rappelle ainsi Suzanne Clément dans Laurence Anyways, qui accompagne l'homme de sa vie alors qu'il se transforme... Bref. Les acteurs sont époustouflants, absolument tous, surtout Eddie Redmayne - bien sûr - qui fait un travail corporel ahurissant et le film est incroyablement touchant : une scène entre Stephen et sa femme vers la fin du film m'a personnellement mis un coup au coeur franchement violent. Un peu comme si Colin Firth m'avait latté la tronche si fort que j'en étais devenu dépressif (allez voir Kingsman, allez voir Kingsman). Cependant, une fois le film terminé, on se prend à se demander quel était son but. Au final, en dehors de la romance, l'histoire ne va nulle part, et s'il est indéniable que ce sont 2h délicieuses à passer au cinéma, une fois sorti de la salle on risque de l'oublier trop rapidement.


C'est là que The Imitation Game remporte la manche (comment ça c'est pas un concours ? Mais si ! Même que ça s'appelle "Renaud décide le meilleur biopic scientifique des Oscars selon des critères totalement arbitraires, puisque c'est lui l'arbitre), puisqu'il s'est tout aussi excellent en termes de professionnalisme jeu, cinématographie, montage, décors et costumes...), son histoire est bien plus importante. Alan Turing est un mathématicien qui a conçu une machine aidant à décoder les messages codées du 3ème Reich pendant la Seconde Guerre mondiale, mais qui n'a jamais été reconnu publiquement pour son travail. Pour être plus précis, il s'est quand même bien fait niquer la gueule sévère même, alors que c'est globalement grâce à lui que l'Angleterre s'en est sorti... mais vous me dîtes, Renaud, là on ne parle plus de cinéma ? Tu es en train de dire que c'est un meilleur film parce que la véritable histoire est plus intéressante/importante, alors que le cinéma, ce n'est pas la vie, c'est le mensonge, l'imitation la duperie la supercherie ?


Et ben ouais. C'est exactement ce que je dis. Parce qu'il n'y a pas d'art plus démocratique et populaire que le cinéma, et qu'une histoire pareille mérite d'être racontée, même si c'est fait par le biais d'un medium qui va dramatiser l'Histoire et la faire rentrer dans le cadre d'une narration classique ! Car quoi qu'il arrive, nous créons des histoires, même en étudiant notre passé (cf. mon mémoire de M2, woot woot), et si transformer un peu la vérité pour la transmettre ici est nécessaire, alors c'est un mal pour un bien. Parce qu'une telle histoire mérite d'être connue, parce qu'il faut connaître Alan Turing et son oeuvre, c'est une question morale. Et l'art peut-il transmettre une morale ? Souvent, je réponds que non, et que si c'est le cas c'est dégueulasse. Mais là, je réponds plutôt : allez vous faire foutre, ce film est d'une importance capitale pour l'humanité un point c'est tout, et nos enfants à l'école devrait apprendre que si les Alliés ont gagné la guerre, ce n'est pas parce qu'ils étaient plus forts ou parce que c'étaient les gentils, c'est parce que des hommes et femmes de science, détachés de toute question de morale, ont inventé quelque chose. Et si Turing est pensé par certains comme un monstre, une machine, il est au contraire le plus humain de tous. Je vous réfère ici à mon passage préférée du film, lorsque petit Turing découvre les langages codés grâce à son ami Christopher, et qu'il compare cela aux véritables interactions sociales : tout le monde dit des choses pour en sous-entendre d'autres, et le langage est un code permanent...

Bref je me tais, ces films sont bien, surtout celui sur Turing, tous les acteurs et actrices sont magnifiques, allez les voir. Voilà.

mercredi 28 janvier 2015

Into The Woods : Charmant, mais pas sincère

Ce mercredi sort en France la nouvelle adaptation musicale de Rob Marshall (surtout connu pour sa version cinéma de Chicago), Into The Woods, adaptée de la comédie musicale du même nom de Stephen "fuckin Genius" Sondheim et de James Lapine. Il s'agit d'une reprise de plusieurs contes des Frères Grimm dans une approche plus sombre, où les personnages se croisent et sont confrontés au désenchantement, à la mort du happy end: Cendrillon, Raiponce, Jack, le petit Chaperon rouge... des princes, une sorcière, et un triste couple qui veut à tout prix un enfant.


Et donc qu'en est-il de ce film ? Tout d'abord, il faut noter qu'une adaptation était en projet depuis longtemps, et c'est finalement Disney qui a eu le dernier mot. Ce qui veut donc dire que certains points narratifs et thématiques n'allaient certainement pas survivre à l'adaptation ; ce qui n'est pas forcément un problème en soi, toute bonne adaptation est une trahison après tout, mais c'est surtout une question de goût. Des morts affreuses, des passages outrageusement sexuels sont retirés, mais le ton, l'atmosphère du désenchantement persiste... un peu. Je fais parti de ceux qui auraient voulu voir le tout aller plus loin, tout comme j'aurais voulu voir certaines chansons rester dans le film ("No More", que chante le boulanger à la fin), pour leur impact émotionnel. Cependant de nombreux passages (dont trois nouvelles chansons composées par Sondheim) ont été coupés au montage, donc peut-être puis-je espérer une version longue plus riche ?


La musique est belle, l'instrumentisation est délicieuse et bien plus riche que celle de l'enregistrement de Broadway, les acteurs sont excellents (j'y reviendrai), les images sont plutôt belles et les effets numériques sont de très bonne facture. Bref, c'est "bien fait" quoi. Et c'est exactement ce que je reproche à la direction du film : tout est fait pour être joli, plaisant, mais sans jamais s'attaquer à la chair de l'oeuvre. Ce sont trente-six plans par minute, une caméra sans cesse - sans cesse ! - en mouvement sans aucune raison dramatique, des effets visuels dans tous les sens... c'est très flashy mais à aucun moment ou presque cela ne sert l'histoire et l'émotion qu'elle porte ! J'irai même jusqu'à dire que la direction de Rob Marshall dessert la musique de Sondheim, qui elle n'a jamais rien de "spectaculaire" au sens bas du terme.


Au contraire, Sondheim considère que la musique et les paroles doivent servir l'émotion, il ne fait pas d'artifices comme on peut entendre dans la majorité des comédies musicales (une montée d'un demi-ton sur la fin de la chanson pour démontrer les prouesses vocales des acteurs, des escaliers des graves et aigus, des démonstrations de technique...), il tente au maximum d'aller vers une authenticité, une vérité, et pour cela il faut, mon cher Rob Marshall, que tu poses ta putain de caméra, et que tu filmes tes acteurs en train de chanter plutôt que d'aller danser la valse avec ton optique !! Et puisque l'image amuse sans transmettre de message clair, le ton du film est très indécis. Cela peut (et c'est peut-être) un parti pris auquel simplement je n'adhère pas : les contes mélangés donnent lieu à des ambiances et des atmosphères différentes, allant de la farce la plus ridicule et surjoué au drame.


Et la forêt, personnage principal sous bien des aspects, semble tout droit sortie des films du Hobbit de Peter Jackson ; tout semble faux, et on se prend (je me prends ?) à rêver aux films de genre des années 80 qui utilisaient des vrais décors et savaient nous enchanter avec simplement cela, parce que cela semblait nouveau ET familier à la fois. Bref, pour que l'émotion naisse et embellisse le chant, j'attendais plus d'authenticité et moins de parade, ce qui est finalement, au vu du sujet du film, un assez gros contresens.


Malgré tout ! Je ne suis pas qu'un gros crevard, et il y a beaucoup de choses que j'ai pu apprécier dans le film. Pour n'en citer que deux : Meryl Streep et Chris Pine. La première, encore nominée aux Oscars pour sa performance, rappelle encore une fois que si c'est facile de blaguer sur son abonnement systématique à la cérémonie, elle le mérite sa maman en slip léopard ! Meryl Streep est vraiment ahurissante, et sa chanson avec Raiponce est un des rares moments réellement bouleversant du film. Quant à Chris Pine... je ne peux l'expliquer. Il faut le voir pour le croire... Le capitaine Kirk joue aussi le Prince Charmant, et il le fait avec tellement de surjeu et d'exagération qu'il est difficile de comprendre ce qu'il fait vraiment. Sans aucun doute une performance à voir, pour le croire.

Fin de l'article les poulets.

lundi 26 janvier 2015

Nightcrawler et Foxcatcher : avec l'Amérique dans le rôle de : les Etats-Unis !

Parmi les films les plus reconnus par la critique et le public à la fin de l'année 2014, on trouve deux films extrêmement noirs et très rafraîchissant, tous deux dépeignant les facettes les plus sombres des Etats-Unis : violence et obsession de l'image, de la représentation si belle - qui ne peut naître que d'un acte de violence.

Je dis par la critique, et non pas par l'académie ou les cérémonies, puisque ni Jake Gyllenhaal - qui incarne le "héros" de Nightcrawler - ni Channing Tatum - rôle principal de Foxcatcher - n'ont été nominés aux Oscars, malgré le fait que la performance du premier soit ma préférée de l'année entière (Pardon ? Mon avis n'aurait donc aucune importance ? Mais j'ai vu 126 films sortis en 2014 quand même ! Non ? On s'en fout ? Ok alors !). Foxcatcher n'est pas non plus nominé pour l'Oscar du meilleur film malgré ses nominations dans les autres catégories "majeures" (comme le disent les critiques bien placés, qui semblent oublier que l'académie récompense également les avancées scientifiques et met toujours l'accent - un petit accent - sur les prouesses visuelles et sonores du cinéma spectaculaire)... quant à Nightcrawler, il peut être très content d'avoir reçu une nomination dans la catégorie Meilleur Script Original, que Dan Gillroy mérite amplement. Passer du semi-nanar film cool Real Steel à ça, franchement je trouve ça beau.


Foxcatcher raconte la rencontre (véritable) entre un milliardaire descendant d'une famille fondatrice de l'histoire des Etats-Unis et un catcheur ; le premier est fou, excentrique, dangereux et passionné par la force physique, le deuxième est simplet, calme, inoffensif et champion olympique de lutte. Le milliardaire, joué par Steve Carell - qui transforme son Michael Scott de The Office pour en faire un monstre vulnérable et dérangé - décide de financer l'équipe nationale de lutte. Sa façon à lui de participer à l'effort de démonstration de la puissance américaine au moment de la Guerre Froide... ce qui est en accord avec l'histoire de sa famille, qui dès les débuts du pays a fourni des munitions aux révolutionnaires. Donc... il est fou, le catcheur est très influençable, très vite ça part en sucette quoi.


Nightcrawler suit un homme qui est, contrairement à ce que l'on peut lire ici et là, tout sauf fou. Il a des traits de sociopathe, mais ressemble aussi à quelqu'un qui aurait le syndrome d'Asperger. Le personnage de Jake Gyllenhaal veut réussir à monter son entreprise, gravir les échelons bref vivre le rêve américain en plein Los Angeles quoi ! Pour ça, il a étudié les affaires et les comportements humains. Il se lance par un coup du hasard dans la vidéo : les "nightcrawlers" sont des pseudos-journalistes qui guettent les accidents, meurtres, et vols en écoutant les radios de la police afin de filmer des scènes bien dégueulasses, puis les vendre aux émissions "d'information" locale qui pourront ainsi terroriser leurs spectateurs à grands coups de sensationnalisme malsain. Parce qu'attention, on ne diffuse pas n'importe quoi : un vol dans un beau quartier résidentiel blanc oui ! Un meurtre entre mexicains dans un coin glauque, ça n'intéresse personne (Vous vous souvenez de la fin de Boyz n the Hood?), il faut que les citoyens se sentent en danger !


Deux films donc qui parle des Etats-Unis et de sa mise en scène, sa mise en image. Les deux œuvres sont parasitées par les images, c'est-à-dire par des commentaires sur la réalité, l'invention d'une narration qui vise à construire un rôle. L'Amérique, c'est le masque qui cache le vrai pays : c'est John DuPont (Steve Carell) qui dirige un documentaire sur son rôle de coach et de leader de l'équipe de lutte, c'est Lou Bloom (Jake) qui déplace des photos de famille sur un frigo pour les mettre à côté des impacts de balle... l'invention, qui devient ensuite le message transmis par les médias. On en revient alors à 1984, avec ce héros dont le travail consiste à modifier les journaux du passé pour que le gouvernement ne se contredise jamais... lorsque le message est diffusé, lorsque le mensonge est sur toutes les lèvres, devient-il vérité ? La réflexion est d'autant plus intéressante que le cinéma est le medium le plus adéquat pour une telle réflexion sur l'image ; non pas que ces deux films eut besoin d'être métaphysique pour déchirer leur maman, mais avouez que c'est un plus non négligeable !


Pour des raisons personnelles, j'ai préféré Nightcrawler, ne serait-ce que pour son utilisation aberrante - c'est-à-dire géniale - de la musique : les thèmes et motifs qui accompagnent les succès de Lou Bloom sont similaires à ceux qu'on entendrait dans un film de super-héros (le compositeur a co-composé The Dark Knight et a dirigé toute la saga Hunger Games), et ce malgré la nature absolument abjecte et immorale de ceux-ci.
Bref. Vous voulez de la fichtre de bonne performances d'acteurs, de la direction extrêmement discrète et bien mesurée, des histoires assez excellentes et par dessus cela une réflexion sur la notion d'image, je vous recommande ces deux bijoux.


jeudi 22 janvier 2015

Kingsman : LE MEILLEUR PUTAIN DE FILM DE TOUS LES PUTAIN DE TEMPS

Non. Ce n'est pas vrai. Là, je viens de vous mentir. Mais maintenant vous êtes en train de lire cet article, donc, ça a marché ! Même pas honte, et vous savez pourquoi ? Parce que je veux vraiment vous parler du nouveau film de Matthew Vaughn, et je veux vraiment que vous alliez le voir, et que vos amis aillent le voir, et que votre grand-mère et son petit caniche aillent le voir. Ou plutôt non, pas votre grand-mère... elle risque de trouver ça un peu bizarre.

Le Grand Rex a proposé cette semaine une avant-première de Kingsman, qui sortira sur nos écrans le 18 février prochain, et je veux et j'exige un succès commercial pour ce film chez nous ! Voici donc deux trois mots sur le film, toujours sans trop dévoiler sur le contenu.


Matthew Vaughn est un homme de grand spectacle. Il aime le cinéma de genre et la démesure - celle qui montre un réel attachement et un amour, pas celle qui s'exprime par le sarcasme et le cynisme des désœuvrés - et l'a montré à travers sa filmographie. En fait, ses films rappellent un peu le jeu vidéo Comix Zone ; on a sans cesse l'impression d'être dans une bande dessinée pulp totalement déjantée... et d'ailleurs, trois de ses cinq films sont adaptés de comics.


Après s'être attaqué aux films de gangster (révélant au passage un certain Daniel Craig, qui deviendra James Bond, c'est mon moment "coïncidence rigolote" façon Karim Debbache) avec Layer Cake, aux épopées merveilleuses avec Stardust (il a d'ailleurs retiré le cynisme de l'oeuvre d'origine de Neil Gaiman) et aux films de super-héros avec Kick Ass et X-Men First Class, Matthew Vaughn adapte à nouveau un comic écrit par Mark Millar, Kingsman. Et ça parle de quoi ? D'une agence d'espionnage so british avec notamment Colin "so swagg" Firth et Michael "Alfred" Caine, et d'une nouvelle recrue un peu... un peu prolo. En gros, c'est My Fair Lady sauf qu'à la place d'Audrey Hepburn, on a un jeune loubard au grand coeur. My Fair Lady, mais en film d'espionnage avec des explosions partout, de la violence totalement gratuite et franchement tarée, et un scénario sans aucun complexe.


Matthew Vaughn aime les films d'espionnage à l'ancienne, il en aime les codes et joue avec tout en ajoutant son propre style : des bastons absolument outrancières filmées avec un dynamisme qui rappelle les débuts de Guy Richie (je vous promets une scène mais vraiment d'anthologie dans une église extrémiste), de l'humour bien rentre dedans, une histoire dans la surenchère absolue, des couleurs flashy et le tout enrobé dans une musique entraînante et épique signée Henry Jackman... sans oublier le placement de produit le plus ABUSE de l'histoire de la vie. Michael Bay et le mec qui a fait World War Z peuvent aller se rhabiller, Matthew Vaughn a calmé tout le monde là.


Le réalisme, on s'en contreflanche ici. Matthew Vaughn prend le contrepied total de la tendance actuelle et signe une déclaration d'amour explicite (et même ultra explicite, vu que les personnages eux-mêmes le mentionnent) au cinéma d'espionnage pulp sans complexe, aux histoires rocambolesques, aux héros magnifiques et aux méchants hauts en couleur. Et à ce sujet... Samuel L. Jackson joue le vilain bonhomme dans Kingsman, et vu comment Vaughn avait scotché tout le monde avec De Niro dans Stardust (il joue Capitaine Shakespeare, un pirate sanguinaire totalement gay qui danse dans ses appartements en portant des robes), attendez-vous à ce qu'il ajoute un petit plus à la performance de Jackson. Qui plus est, les convictions du méchant du film sont honnêtement bien trouvées.


Qu'est-ce qu'il faut que je dise de plus pour vous donner envie de voir ce film ? Vous dire que Mark Hamill joue dedans ? C'est le cas. Vous dire que Colin Firth tabasse un type avec une Bible ? C'est le cas. Vous dire qu'une nana se bat avec des lames qu'elle a à la place des pieds ? C'est le cas. Vous dire aussi que la salle entière du Grand Rex n'a cessé de rire aux éclats et a même applaudi certaines séquences durant le dernier acte ? Vous dire enfin que dans ce film on assassine des bébés ? Non, ça n'est pas le cas, et si vous voulez voir des bébés morts, n'allez pas voir ce film, allez plutôt voir un psy.

Enfin, ce film compte pour moi parce que c'est un film de Matthew Vaughn, et que ce monsieur, c'est un peu le réalisateur fétiche de mon petit frère et moi. Nous avions adoré Kick Ass et X-Men avant de découvrir ses autres films, puis désespéré quand il a annoncé ne pas réaliser Kick Ass 2, ni X-Men Days of Future Past... mais à la place, il a fait ça. Et pour cela, nous lui disons, merci. Merci pour un film qui fait du bien au cinéma actuel.

Dans ta face ouais.

Big Hero 6 (Les Nouveaux Héros) : La charge morale d'un poids-lourd comme Disney

Dans 3 semaines sortira en France le nouveau dessin animé des studios Disney, Big Hero 6, ou Les Nouveaux Héros. J'ai pu assister à une séance en avant-première ce mercredi, et voici donc deux trois mots sur ce que le film m'a apporté.


Tout d'abord : il faut dire qu'il s'agit du premier dessin animé où Disney exploite le catalogue Marvel : les personnages sont adaptés très librement d'une série de comics pour adolescents qui elle-même avait pour objectif d'attirer les lecteurs de manga vers la bande-dessinée américaine (de la même manière que la série Runaways de Brian K. Vaughan a pu le faire). Et cela se voit tout de suite dans l'esthétique du film ; cela fait de nombreuses années que les dessins de la machine à rêve s'inspire du style asiatique - nez minuscules, yeux gigantesques -, mais cette fois c'est en phase avec l'univers présenté ! L'histoire prend place dans la ville de San Fransokyo, mélange carrément littéral de San Francisco et Tokyo, avec un pont/torii (oui.) pour l'illustrer.


L'histoire, d'ailleurs, n'a pas énormément d'importance. Les codes sont respectés à la règle, les scénaristes ont bien lu le Save The Cat! de Blake Snyder, à un point que cela peut devenir frustrant pour un spectateur aguerri. En deux mots, le pitch : Hiro est un petit génie de 13 ans qui, à l'aide d'un robot médical inventé par son grand frère, et de ses amis, tente d'arrêter un mystérieux criminel au masque de Kabuki qui a volé une de ses inventions pour faire le mal. C'est avant tout une intrigue de formation, avec ici et là quelques twists, un humour brillant, des scènes de fausses défaites, un happy end... bref, un film de super-héros très Marvel quoi.
Mais il faut se rappeler qu'il s'agit d'un film pour enfants avant toute chose, ce qui explique cette rigueur. Mais au delà de l'histoire, il y a l'émotion, et les thématiques engagées...et là, Disney vise extrêmement juste.


Car après tout, on ne parle pas ici d'un petit film d'animation européen qui sera vu par deux cent mille personnes. On parle de Disney, et peu importe nos goûts personnels, Disney est un géant, et quand ils sortent un film, ils savent que cela sera pour beaucoup de familles LA sortie de la saison, de l'année. Cela coûte cher d'emmener tous ses enfants au cinéma, et la majorité des gens vont choisir Disney, et pour cette raison, la compagnie a un rôle moral à jouer. Quand on a la possibilité d'influencer et d'éduquer autant d'enfants par l'image, les idées et idéologies du film se doivent d'être formatrices.


Ainsi, dans Big Hero 6, on ne parle pas de super-héros comme on aura pu le faire auparavant : plus d'araignée radioactive/génétiquement modifiée, ici les héros sont tous des Tony Stark en puissance. Des scientifiques, capables de mettre au service leurs cerveaux pour le bien de la société. Et les enfants dans la salle, le mercredi après-midi après l'école, les voient devenir des héros, et peut-être un jour eux aussi voudront étudier les sciences et devenir les véritables héros de notre planète. Le robot d'ailleurs - nouvel emprunt à la culture japonaise - est lui-même un robot médical, et conformément aux lois de la robotique il ne peut blesser les êtres humains.


Il est par ailleurs extrêmement attachant et rappelle beaucoup la tendresse et la simplicité qu'ont su évoquer avant lui Groot, la créature de Frankenstein (qui fait un cameo sonore dans le film) et le Géant de Fer. ce dernier était d'ailleurs son opposé à l'origine, une arme de guerre, dans un film qui prenait place pendant la Guerre Froide mais qui est sorti au cinéma à l'époque de la guerre contre le terrorisme... quand je vous disais que les géants de l'animation connaissent leurs responsabilités morales envers les enfants ?



Enfin, c'est dans l'émotion que Big Hero 6 réussit ; et s'il sacrifie le développement des personnages secondaires de l'équipe pour se centrer sur Hiro et son robot, c'est pour donner à son arc narratif le poids nécessaire pour nous émouvoir. Le cœur du film est, comme on le voit dans la dernière bande-annonce, la difficulté du deuil. Disney n'a jamais hésité à utiliser ce thème dans ses dessins animés, et il est particulièrement bien traité ici.


Cet article, bien trop long, reflète ainsi les pensées qui m'ont traversé l'esprit durant la projection d'hier. Après une première demi-heure de film absolument magistrale, sans doute un de mes débuts films préférés des films d'animation Disney, les ficelles scénaristiques trop visibles et prévisibles même ont commencé à m'agacer, malgré les nombreuses blagues franchement drôles ici et là... jusqu'à ce que je décide de me tourner vers le public, et de voir les enfants dans la salle. Les yeux fixés sur l'écran, entièrement emportés par l'histoire de Hiro. Et quand on voit des tout petits, mais vraiment tout petits, être capable de comprendre la douleur intérieure de Hiro, apprendre des émotions et de la vie grâce à un dessin animé avec des bonhommes aux yeux plus grands que des oranges... on ne peut s'empêcher de penser que c'est une réussite. Disney, "je suis satisfait de mes soins".

Oh ! Et restez pour la scène post-générique. C'est tordant

mercredi 21 janvier 2015

Mortdecai, David Koepp : Cette moustache est si moche, Olivia Munn est si belle

Bon, alors c'est quoi ce film ? Ah, Johnny Depp nous raconte le film plutôt que de nous laisser comprendre par nous-même, ça s'annonce mal... mais. Mais ? C'est quoi cet accent ? Je comprends pas. Pourtant je crois bien avoir une agrégation d'anglais, mais Johnny c'est quoi cet accent ? Ok, admettons hein.

Bon. C'est assez lent, et les blagues sont... très ratées. Mais. MAIS. C'EST PAUL BETTANY. AVEC UN ACCENT COCKNEY. Autant le dire tout de suite, toutes les scènes de Paul Bettany, qui joue le garde du corps rustre de Mortdecai, collectionneur d'art mafieux aristocrate coincé, sont délicieuses juste parce que nomdidiou, Paul Bettany qui fait un accent cockney. Et livre la seule performance d'acteur intéressante du film pour l'instant...


C'est lent. Et toute l'histoire tourne autour de la moustache moche de Johnny Depp, et de sa femme - Gwyneth Paltrow, qui est quand même sacrément classe et jolie - qui refuse de l'embrasser... ah ! Voilà Ewan Mc Gregor du MI5 qui vient apporter un peu d'intrigue autour d'un tableau volé...

Mais c'est si lennnnt. Et Johnny Depp joue n'importe comment... c'était quand la dernière fois que Johnny Depp était bien dans un film ? Heureusement quelques scènes d'action sont vraiment fun, notamment parce que Paul Bettany est là. Et il se tape tellement de nanas dans le film ! C'est le moment où même un film pas très bien comme celui-ci réussit à toucher la vérité, la vraie, la beauté du monde : Paul Bettany est tellement merveilleux que toutes les femmes lui sautent dessus, même avec un accent cockney et des bottes en caoutchouc.


AH ! OLIVIA MUNN. Bon, elle joue une nympho criminelle fille de Jeff Goldblum (c'est dans le film), c'pas génial, mais elle le fait bien, et ça fait plaisir de la voir pendant... deux scènes. Malheureusement, elle ne finit pas par épouser Paul Bettany. Dommage, ce film pas terrible en serait devenu un chef d'oeuvre !

mardi 20 janvier 2015

Wild, Jean-Marc Vallée

Presque un an exactement après la sortie de son film précédent Dallas Buyers Club, Jean-Marc Vallée revient avec un nouveau biopic. L'histoire d'une femme qui décide de reprendre sa vie en main... et par là, elle entend marcher 1600 km dans le désert. Ah c'est clair que c'est plus impressionnant que de se mettre au yoga !


Il paraît toujours difficile de trouver le bon dosage dans un film traitant d'émotions fortes, mais en deux films Jean-Marc Vallée a su montrer qu'il est parfaitement capable d'éviter le pathos et de toucher, faire rire et émouvoir. Wild est une histoire triste, celle d'une femme qui veut se débarrasser de ses nombreux démons: père violent, mère malade, abus de sexe et de drogues...


Ce n'est pas un film original, la découverte de soi et l'initiation par le voyage et le contact à la beauté de la Nature, on l'a déjà vu, mais le film est authentique, c'est-à-dire qu'il sonne juste. Le personnage de Reese Witherspoon guide la narration et ne cesse de revenir sur ses démons, cependant ce ne sont jamais de simples flashbacks, Jean-Marc Vallée adopte une technique proche du "stream of conciousness" de la littérature. Elle voit quelque chose, ce qui la renvoie à plusieurs souvenirs, des fragments, des sensations. Le passé est ainsi abordé de manière sensorielle et non mécanique, et c'est ce qui fait une grande partie du charme de l'oeuvre.

Ce sont le reflet de deux enfants brisés dans l'oeil d'un cheval, le sourire d'une mère, un saut dans une flaque d'eau, une dispute dans une voiture... et tout finit par se mélanger et rejoindre l'instant présent lorsqu'un enfant se met à chanter et offrir la beauté tant recherchée pendant tout ce périple.


Wild est à l'image de cette scène avec l'enfant qui chante ; un film peut-être pas révolutionnaire, mais qui sonne toujours juste. Et qui donne à la fois envie de s'attaquer à ses propres démons et d'aller traverser un désert. Comme un ouf.

lundi 19 janvier 2015

Souvenirs de Marnie, Hiromasa Yonebayashi

Il est toujours difficile de sortir un film estampillé Studios Ghibli quand on n'est pas Myazaki le père, mais heureusement certains comme Hiromasa Yonebayashi - ont du courage, du culot, et des choses à dire.

Souvenirs de Marnie est un film extrêmement mélancolique, et surprenant dans le traitement de son personnage. Il suit une petite fille nommée Anna, d'à peine plus de dix ans, durant ses vacances d'été . Anna a pour particularité d'être agoraphobe, ce qui est traité avec beaucoup de douceur, et un sujet plutôt inattendu dans un film de la sorte. Le film commence réellement lorsque sa tutrice (Anna est adoptée) l'envoie en vacances à la campagne pour profiter de l'air pur, suite à une crise d'asthme.


Et c'est là que la magie se fait ressentir. Quelques plans, des dessins sans animation, une touche de musique, et on ressent le calme, la vie du lieu. Anna, très mal à l'aise avec la majeure partie des gens, préfère passer son temps au calme, à dessiner, sur la barque d'un vieux pêcher qui ne parle jamais. Puis vient la rencontre avec Marnie, et le film bascule dans un va-et-vient de plus en plus trouble entre le rêve et la réalité, tandis que les sentiments deviennent eux de plus en plus apparents.


Je ne veux pas trop en révéler sur l'histoire. Même si l'oeuvre tombe dans le didactisme et l'explicatif sur la fin, là Yonebayashi avait pourtant su montrer qu'il savait raconter par l'image, il est certainement plus agréable de découvrir par soi-même. C'est beau, c'est surprenant, c'est touchant, c'est même carrément mélodramatique, mais qu'est-ce qu'on s'en fout les amis, c'est beau ! Et rien d'autre ne compte. Coup de cœur de ce début de mois de janvier.

dimanche 18 janvier 2015

The Smell of Us, Larry Clarke

Fuck you movie.

Really, fuck you.

Fuck youuuuuuuuuuuu.

Fuck you !

I hate you, fuck you.



Bon, voilà. Larry Clarke, c'est un papi punk rockeur obsédé par la génération jeunesse, celle de ceux qui ont l'âge de penser qu'ils se comportent comme des adultes mais n'en seront jamais, celle des rebelles, des drogués et des fêtards. Et papi Clarke sait capturer cet esprit, ça il n'y en a aucun doute. D'ailleurs, ses talents de metteur en scène et de maîtrise de l'expression cinématographique ne sont pas du tout remis en question dans ce petit texte. Le film porte extrêmement bien son nom, les couleurs des prises de vues, les sons et les cadrages en gros plan font ressentir exactement... l'odeur des choses, et c'est déjà assez incroyable. Les acteurs, tous inconnus au bataillon (je recommande très vivement le dossier des Cahiers de janvier qui rassemble des interviews des comédiens et techniciens), convainquent aisément et impressionnent, la bande-son est excellente... Larry Clarke décrit un monde obsédé par sa propre image et par la vision et la diffusion de l'excès, ce qui fait écho au film en tant que tel. Ouais, c'est littéralement un film métaphysique !


C'est juste que voilà, des lycéens qui font du skate-board puis se prostituent chez des papi qui font bien trop penser à Larry Clarke lui-meme, pour se faire lécher les pieds à l'écran pendant trois minutes sans parler des innombrables scènes de sexes outrageusement graphiques... et ben c'est assez dégueulasse en fait !

Dégueulasse, parce que ça ne va nulle part. Parce que dans un registre similaire, Ozon a fait Jeune et Jolie il n'y a pas si longtemps, et il allait quelque part. Il choquait, mais faisait réfléchir. Dans The Smell of Us, il ne reste que le choc, aussi gigantesque soit-il. Dégueulasse, parce que le choc pour le choc, c'est immoral et ça ne mène à rien. Dégueulasse, parce que l'omniprésence du Palais de Tokyo laisse à penser que ce type de cinéma peut être "supérieur" à tout ce qui lui est plus conventionnel, et se rapprocher des installations du musée. Dégueulasse, parce que la meilleure scène du film est une semi-tentative de viol incestueuse qui n'a aucun autre intérêt que ce qu'elle est, c'est-à-dire une perversion. Et dégueulasse enfin, parce qu'il laisse entrevoir le portrait extrêmement sensible et touchant d'une jeune fille perdue dans ce monde abject à la fin du film, avant de rajouter une ultime scène qui vient détruire tout ce sentiment, montrant bien ainsi le côté extrêmement accidentel du produit fini. Et si l'accident est la plus belle chose qui puisse exister au cinéma, ce n'est pas pour cela qu'en abuser en grandit la qualité de l'art.


Mais en d'autres termes : fuck you movie, fuck you fuck you I hate you.

Les Nouveaux Sauvages, Damián Szifron


Plus tôt cette semaine, le nouveau film de Damián Szifron a été nominé aux Oscars pour le meilleur film étranger de l'année 2014, contrairement à, par exemple, le film de la sélection canadienne, le Mommy de Xavier Dolan. D'un côté, un film pop humaniste, courageux, sur l'héroïsme et la beauté de chacun d'entre nous, et de l'autre, une série d'histoires courtes reposant sur le postulat que les hommes et les femmes sont des putains d'enculés.

On aurait pu penser que le film de Xavier Dolan aurait plus de chances de décrocher une nomination que la fresque cynique de l'argentin Szifron, les Oscars symbolisant l'idéalisme américain à son paroxysme, la réussite et le triomphe de la liberté et de l'homme face à l'adversité... mais peut-être la catégorie des films étrangers est à part.


Contrairement à une grande partie des critiques et du public (comme je l'ai bien compris pendant la séance, puisque j'étais le seul à ne pas rire), je n'ai pas du tout aimé Les Nouveaux Sauvages. Exposer la nature bestiale de l'homme, son irrationalité et sa perversion est pourtant un sujet qui peut me séduire, mais ce n'est pas ce qui m'a déçu dans ce film, c'est dans son manque d'expressivité.

Les Nouveaux Sauvages est une série d'histoires brèves, allant de 5 à 30 minutes, ayant toute pour thème un certain pétage de plomb aux proportions totalement loufoques. Et au moins trois des histoires sur les six ont tout pour être désopilantes : la première par exemple, montre les passagers d'un avion se rendre compte qu'ils connaissent tous le pilote, et que celui-ci va crasher l'avion pour se venger de ce qu'ils ont pu lui faire subir dans sa vie (ex-copine, prof de musique, ancien psy...).


Et c'est là que le film est démesurément frustrant à mes yeux : là où les idées sont excellentes, le langage cinématographique ne suit pas. Les dialogues et les scènes ne fournissent pas aux acteurs ni à la mise en scène assez de tension pour aller réellement dans le déjanté, la folie totale, tout est présenté avec un académisme aberrant quand on le compare à la noirceur de ce que l'image illustre : des tromperies, des meurtres, des explosions, des caca sur ton pare-brise (oui oui, c'est dans le film)... Et par dessus cela, Szifron a le culot de mettre quelques plans acrobatiques ici et là, en fixant la caméra à une porte ou à une roue de voiture, mais sans que cela n'ait absolument aucun intérêt dramatique !

Une bonne idée ne suffit pas à faire un film ; j'aurais bien vu le script retapé puis redirigé par quelqu'un comme Tarantino, quelqu'un qui comprend bien ce genre de cinéma mais qui utilise avec plus de justesse le rythme de l'image, le montage, et les feux d'artifices grotesques. Là, on ne va jamais assez loin pour éprouver de l'empathie ou aller vers la jubilation de l'excès...


Mais peut-être le film vous aura fait rire, et tant mieux, et tant pis pour moi !  Car c'est bien triste à dire, mais le seul critique à être d'accord avec moi d'après mes lectures est Pierre Murat, et ça, c'est franchement rare.

vendredi 16 janvier 2015

A Girl Walks Home Alone At Night

"Le premier western vampire iranien". Forcément, quand on vent un film de la sorte, ça donne envie ! Et évidemment, cela place la barre outrageusement haut en termes d'attentes, ce qui n'est pas vraiment un cadeau au final. Amis spectateurs, passez outre, et si vous appréciez le cinéma qui s'installe dans la lenteur et la musique, n'hésitez pas à vous pencher sur ce film.


Premier long métrage de la réalisatrice iranienne Ana Lily Armipour, AGWHAAT (oui, il est foutrement long ce titre vous ne trouvez pas ?) décrit la vie d'une ville pétrolière déserte, sale, glauque. "Bad City", comme l'appellent les personnages. Non loin des machines qui pompent le sang de la terre, un immense tas de corps humain en décomposition, qui semble ne choquer personne.

Au milieu de tout ça, on suit une poignée de personnages : le héros, en galère financière à cause de son père, devenu accro à la morphine. Un dealer de drogue, et une vampire. Le scénario n'est pas vraiment surprenant, mais cela n'empêche pas le film de séduire : il est lent, mais pas comme un prof d'histoire qui s'embrouillerait dans ses notes et répéterait quinze fois une remarque la chute de l'Empire Ottoman, plus comme une promenade en bateau au coucher de soleil. Il se savoure et se laisse porter par une bande-son pop rock de toute beauté. Rien de révolutionnaire dans le spectre du cinéma international, mais rappelons-le : c'est un film iranien ! Par UNE réalisatrice ! Donc, ça, c'est quand même vachement cool, pour parler avec lyrisme et style.



Au delà de tout ça, la grande force du film, c'est de donner un souffle de vérité à ce lieu imaginaire, et ce malgré le faible nombre de personnages ; ils sont tous assez archétypaux (et non caricaturaux... à l'exception du dealer de drogue) pour donner l'impression d'une vaste fresque. Bad City semble vraie, malgré son absurdité, un peu à la manière des villes dans les films de David Lynch. Donc,  joli mensonge, cher film !


Hard Day

Attention, grand n'importe quoi en vue. Et pas au loin, comme le bateau d'Astérix aperçu au loin par les pauvres pirates, non, là c'est du grand n'importe quoi directement dans ta face, genre ton téléphone qui te pète à la tronche, bim.



Sorti lors de la première semaine de 2015 en France, Hard Day, thriller coréen de Kim Seong-hun, raconte l'histoire d'un flic pas entièrement réglo qui est obligé de cacher des papiers compromettants lors de la soirée où sa mère est enterrée. Et vu que sa vie c'est pas encore assez de la merde, il renverse un type en voiture, et tente de cacher le corps.

Le reste du film est un mélange entre humour noir à la Coen bros - c'est-à-dire un humour naissant de l'absurdité des situations et de la position du spectateur, qui en sait plus que les personnages et peut ainsi rire du décalage créé, et de la misère de l'homme - et une intrigue policière plus classique; des magouilles au sein des forces de l'ordre, un complot de grande ampleur qui apparaît au fur et à mesure du film... le tout culminant en un affrontement finalement assez classique dans le fond (le héros face au méchant) mais totalement barré dans la forme.


On retiendra surtout du film une grande maîtrise des scènes de tension : lorsque le héros tente de s'infiltrer dans la morgue pour cacher le corps renversé sur la route dans le cercueil de sa mère sans se faire repérer, et qu'il fait passer le corps par un conduit d'aération en le tirant avec un jouet appartenant à sa fille, et lors d'une scène impliquant une bombe et deux personnages ennemis.

Un bon film !