mardi 17 février 2015

Le Dernier Loup : et la bête dévora l'Annaud

Nous sommes lundi soir, sur les Champs Elysées. La grande salle au beau plafond de l'UGC Normandie est pleine à craquer, les invités journalistes et producteurs sont partout, sauf au fond de la salle où se rassemble les spectateurs lambda. Nous sommes là pour l'avant-première du film Le Dernier Loup, de Jean-Jacques Annaud. Le bonhomme est un des rares membres du club francophone "le spectacle à l'américaine" avec Luc Besson (même si leurs parcours sont très différents), et on retrouve dans cette nouvelle oeuvre tout ce qu'il aime : la grande nature, les animaux, les conflits à échelle humaine et aux idéaux métaphysiques.


Je risque de répéter le mot spectacle à de nombreuses reprises, mais c'est bien là qu'est tout le propos: toute la promotion du film est faite sur la qualité unique du travail fourni pour réaliser le projet. Filmé en Chine et en Mongolie, avec des vrais loups et chevaux dressés, avec très peu d'effets numériques, Le Dernier Loup joue la carte de l'événement, du cinéma façon Lawrence d'Arabie. C'est d'ailleurs pour cela qu'avant la diffusion, nous retrouvons l'équipe technique du film sur scène : les stars ne sont pas les acteurs, ce sont le chef opérateur, le chef monteur, le chef machiniste, le mixeur son... ceux qui ont fait du film une expérience immersive.


Là dessus, c'est absolument réussi. Toutes les scènes d'action sont impressionnantes, avec en tête une course poursuite en pleine tempête de neige entre des loups et des chevaux, en pleine "nuit" (pour ne pas affoler les loups, toutes les scènes étaient tournées de jour puis retravaillées, comme les fameuses "nuit américaines" d'antan, ce qui donne un aspect surréel voire lyrique aux apparitions nocturnes majestueuses des loups). La technique est là, et l'émotion aussi, on se retrouve facilement impliqué dans les événements grâce à la musique - imposante et rentre-dedans - d'un James Horner qui n'avait pas été aussi inspiré depuis longtemps, et grâce au scénario qui place des enjeux dramatiques efficaces. J'en profite justement pour prévenir : attention, des animaux meurent dans l'histoire, et oui, c'est absolument affreux.


Mais justement, à côté du spectacle, qu'en est-il du scénario ? Le film raconte comment deux jeunes hommes chinois sont envoyés en Mongolie pour apprendre la langue à une tribu nomade. Ils se retrouvent confrontés à leur culture, leur façon de vivre, et leur environnement c'est-à-dire le monde des loups. Le héros recueille un loup par pure curiosité scientifique et s'y attache. Et là... je suis bien embêté. Avec la forme du film, on s'attend justement à une histoire assez archétypale, qui rentre aisément dans les codes de l'histoire du héros à la façon des mythes. Et si les thèmes sont bien là (opposition entre culture moderne et croyances ancestrales, la civilisation face à la nature, l'individu face à l'immense machine, la transformation du héros), ils sont traités dans une suite d'événement très surprenante. Plutôt que de suivre les codes d'une narration classique avec des causes et des conséquences, des actions puis des réparations, le film suit un développement totalement aléatoire qui se rapproche plus d'un traitement de la vie par l'absurde dans un Robbe-Grillet que dans un pseudo blockbuster.

Par là, le film se retrouve en hésitation constante entre un grand cinéma classique au sens mélioratif du terme, et une narration qui donne l'impression d'assister à la mise en image d'une histoire vraie (ce qui n'est pas le cas, c'est l'adaptation d'un best seller chinois de fiction) mais sans le passage par la case "il était une fois". Je ne sais donc pas du tout quoi penser du film. Les scènes d'action m'ont enchanté, c'est un véritable voyage grandiose dans un des plus beaux endroits de la planète, et tout le côté spectaculaire est extraordinaire, mais le traitement narratif me perturbe trop pour parvenir à me décider.

C'est con hein !
Le film sortira la semaine prochaine partout en France, en IMAX et en pas IMAX, en 3D et en pas 3D. Voilà voilà.

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