lundi 16 mai 2016

Mois de mai : Les autres films au cinéma - partie 1

La Saison des Femmes :

Un film sublime. Vraiment sacrément foutrement sublime de fils de gigolo. La vie épisodique de quatre femmes en Inde. Elles sont définies telles quelles par la société : une veuve, une mariée qui ne peut avoir d'enfants, une nouvelle mariée honteuse aux cheveux rasés, et une danseuse/pute. Qui sont-elles ? Des femmes. Des vraies personnes, complexes et riches, attachantes et émouvantes, contrastées, pleine de beauté et d'imperfections. Des êtres humaines. Le film est absolument horrible, c'est Game of Thrones version la vraie vie, mais il a une force incroyable. L'esthétisme de l'image et des couleurs et des costumes rend criant la violence qui s'y déroule, tandis que les femmes se débattent encore et encore dans l'espoir de vivre. Du girl power qui tâche, du vrai, et avec du style. Bravo, encore et encore et encore s'il vous plait.

Un Homme à la Hauteur

Virginie Efira rencontre l'homme presque parfait ; c'est Jean Dujardin, sauf qu'il mesure 1m36. Ce film aurait pu être outrageusement offensant, il ne l'est dans son contenu qu'un tout petit peu (dans son approche par contre, rétrécir numériquement Dujardin... moins), mais au final il est simplement d'un ennui gigantesque. C'est bien simple, la seule manière de rendre le film intéressant, c'est d'en retirer l'intégralité de ses personnages pour ne garder que celui de Virginie Efira, car cette femme est parfaite, drôle et touchante dans tout ce qu'elle fait.

Money Monster :

Présenté à Cannes en hors compétition et dans nos salles depuis jeudi, le nouveau film de Jodie Foster est tout bonnement un excellent film de genre, qui s'appuie sur des sujets qui nous touchent mais tout en servant une narration qui se veut clairement fictionnelle. Un présentateur télé qui fait une émission excentrique sur la bourse se fait prendre en otage pendant une émission par un téléspectateur qui a perdu tout son argent sur un mauvais coup. C'est assez classiciste (on reconnaît l'époque cinéma dans laquelle Foster a grandi) tout en étant très moderne et dynamique au niveau du rythme et du montage, ce qui fait qu'on ne s'ennuie jamais. L'atout majeur du film, c'est d'avoir George Clooney en présentateur : son star power si unique fait de lui un modèle parfait pour le rôle, et donne à l'oeuvre une dimension supérieur. Plein de supers personnages secondaires (notamment le caméraman Lenny qui est merveilleux), une Julia Roberts en pleine forme, de la tension non stop pendant cent minutes. Que demande le peuple ?
Le seul défaut peut-être, c'est - et c'est étrange pour une actrice - le peu de place qui est accordé aux acteurs pour exprimer leur jeu. Tout le monde est au service de l'histoire finalement, mais sans que qui que ce soit ait le temps de tirer la couverture à lui.

The Nice Guys :

Il est enfin arrivé, le nouveau film de Shane Black. Scénariste star qui a révolutionné les films d'action dans les années 80 puis 90, il a finit par renier la quasi totalité de son travail, massacré lors de leur passage à la pellicule selon lui. Depuis, il s'est fait une petite jeunesse en devenant réalisateur et accouche ici d'un troisième film ; après Kiss Kiss Bang Bang et Iron Man 3 (le meilleur film du MCU et j'assume), voilà The Nice Guys. C'est tout simplement un polar façon fiction pulp, sur un duo de détectives un peu ratés mais très marrants. Russel Crowe et Ryan Gosling sont merveilleux et extrêmement drôles, surtout dans leur dynamique avec la fille de ce dernier ; c'est la petite originalité du film que de rajouter au buddy cop duo une adolescente qui n'a jamais besoin d'être sauvée et qui est en fait une sorte d'équivalent de la nièce dans Inspecteur Gadget. C'est macho mais pas trop, c'est violent mais pas trop, l'histoire est monstrueusement compliqué et les gags fusent aussi vite que des balles. Le point fort comme toujours chez Shane Black : les scènes d'action, toujours astucieuses et inattendues. Dans un genre aussi poussiéreux, heureusement que des auteurs comme lui existe pour nous surprendre à chaque revers. Un vrai ptit bijou.

mercredi 11 mai 2016

[Cannes] Café Society : Oh mon dieu la caméra a bougé !!

Un jeune gars plein de ras-le-bol fuit Manhattan, sa famille juive et son frère criminel pour s'installer à Hollywood et découvrir les paillettes, les starlettes, le glamour et l'amour. Et si les trois premiers lui réussissent, c'est ce dernier qui va l'ensorceler... et le balader entre les deux mondes, côte est et ouest, jusqu'à ce fameux Café Society.


Le générique commence est personne n'est surpris dans la salle : c'est la même police, le même fond, la même musique de jazz. Les acteurs d'abord, dans l'ordre alphabétique, car ce sont eux qui comptent, ce sont eux qui brillent : cette fois, la muse est devenue Kristen Stewart, vraie Janus quelque peu inspirée de l'héroïne de The Appartment de Billy Wilder. Et elle est belle, belle, belle, belle. Une vraie gueule, et une vraie voix, comme Scarlett il y a dix ans. Et puis, outre l'apparition éclair mais très appréciable d'Anna Camp dans un rôle de prostituée débutante et la carrure de Steve Carrell en agent hollywoodien tellement cliché qu'il pourrait se reconvertir dans la vente de Polaroïd, celui qui crève l'écran, c'est le héros : Jesse Eisenberg devient en fait ici une nouvelle incarnation de Woody Allen. Certes, il y apporte sa propre touche, mais il est difficile de ne pas imaginer le réalisateur - plus jeune - à sa place. Mais voilà, Woody est trop vieux pour ces conneries, du coup il se cantonne au rôle de narrateur.



Oui, Woody Allen a une zone de confort, oui, il n'aime parler que d'un nombre de choses extrêmement réduites, et très clairement il en a conscience. Oui, dans le fond, on sait à quoi s'attendre : des histoires d'amours, des mariés infidèles, des fêtes, l'élite de l'Amérique caricaturé jusqu'à en faire des monstres endimanchés trinquant leur verres remplis d'argent. Ce qui change, ce sont les costumes, le décor. Les phrases sont les mêmes, ce ne sont que les mots qui changent.


Et pourtant, dès que le générique se termine, le sourcil se lève. Puis frémit. Woody... est-ce que tu es en train de traverser une fête avec un steadicam ?? Est-ce que tu mets des mouvements de caméras partout dans ton film et de la profondeur de champ ??? EST-CE QUE TU AS FOUTU UNE TRANSITION TELLEMENT DEBILE QUE MEME DANS STAR WARS ILS LE FONT PAS ???? Je suis si heureux. Je ne sais pas ce qui lui a pris, peut-être que l'idée de filmer l'âge d'or d'Hollywood lui a donné envie d'expérimenter et d'être original dans sa composition et son langage filmique mais je ne peux que m'en réjouir : c'est putain de sublime les gars. Les paillettes elles sont des mes yeux là. Superbe. Et le contraste New York/Hollywood est sans pitié : la première, Woody la connaît et la montre comme sa femme. Enfin, si sa femme avait son âge (lol) et qu'il la montrait nue. La deuxième, c'est son monde : c'est le cinéma, un monde qu'il aime inventer comme plus beau et dépeindre avec cruauté.



En effet, si Jesse Eisenberg nous dit que la vie "est une comédie écrite par un écrivain sadique", il ne peut parler que de son monde, dans lequel le réalisateur joue avec son cœur en lui promettant Kristen Stewart sans jamais vraiment lui laisser l'attraper. Aparté : c'pas grave Jesse, retourne voir Adventureland, tu t'en sors mieux dans celui-ci.


J'ai un peu l'impression que ma critique va dans tous les sens et n'a pas vraiment de direction logique, mais j'ai envie de dire, film, c'est tout ce que tu mérites vu ta tronche. Enfin c'pas une critique hein coco, c'est que je parle comme ça moi, mais clairement tu n'as ni queue ni tête. Au milieu de ton intrigue principale, tu nous a foutu une intrigue de gangster, toute l'histoire de la famille juive de Jesse Eisenberg, un ptit sketch sur le fait que les chrétiens sont des lâches et des froussards, un autre sur une prostituée débutante plutôt nerveuse qui relève davantage d'une sitcom que d'autre chose... sans parler d'un portrait monstrueux du monde hollywoodien et de son langage. Oui, à Hollywood selon HollyWoody on ne parle pas anglais, on parle le "name-dropping", c'est-à-dire qu'une phrase n'a du sens uniquement si elle contient les noms de trois ou quatre célébrités. La seule chose qui tente de faire le lien entre tous ses îlots, c'est la narration, la voix du réalisateur qui nous balade de lieu en lieu, d'époque en moment, de succès aux échecs. Jusqu'à un final emprunt de mélancolie, qui a le don de laisser sur la faim.


Sous bien des aspects, Café Society raconte la vie des êtres qui changent. Le temps passe, ou l'environnement évolue, et hommes et femmes se muent. Ce n'est qu'en retrouvant un morceau de passé que l'être se trouve un miroir et se dit finalement, tiens, c'est moi ça ? C'est ainsi que le souvenir revient, puis devient mélancolie, et enfin devient regret. Voilà peut-être comment expliquer le fouillis fascinant d'un film légèrement foufou, d'un réalisateur qui se met à regarder vers l'arrière. 

Je sais que beaucoup s'amusent à cracher sur papi Woody depuis l'après Match Point, mais j'insiste : depuis ses trois derniers films, il a quelque chose de nouveau, et il signe là son film le plus intéressant depuis Scoop. Oui, malgré son côté bancal et imparfait. Mais vous savez ce qui était aussi bancal et imparfait ? Scoop.

mercredi 4 mai 2016

Les films d'avril sur lesquels je n'ai pas écrit

Green Room : Un groupe de punk durs à blouson en cuir = se retrouvent prisonniers dans un club paumé tenu par des néo-nazis. Un survival super gore qui oppose Chekov (Anton Yelchin), bassiste timide, au Capitaine Picard (Patrick Stewart) en leader nazi qui fait peur dans le noir. Très sympa, notamment dans son détournement de certains codes du genre, mais un peu décevant dans sa mise en scène : toutes les scènes de violence sont très floues, vagues, voire hors cadre, comme si le film avait été forcé de s'auto-censurer pour être distribuer. En tout cas, le réalisateur de Blue Ruin continue son chemin, et c'est cool.

Les Ardennes : Le petit frère se tape la meuf du grand déglingué violent pendant qu'il est en prison. Il en sort deux ans après, et très vite c'est la grosse merde. Un polar belge assez frappé et un peu lent au démarrage, qui finit par exploser dans une dernière demi-heure pas loin d'être époustouflante. Avis aux amateurs du genre, ce film là est pas mal du tout. En plus la scène pivot est totalement centrée autour de crêpes, et c'est un point important à souligner.

Everybody Wants Some: Le nouveau film de Richard Linklater est passé un peu inaperçu, parce que quand même à part Boyhood le grand public s'en bat un peu les rognons de son cinéma indie qui parle du temps qui passe et de la jeunesse rock'n roll. Pourtant il a quelque chose de très particulier : c'est un peu une sorte d'American Pie mais version artiste. On suit l'équipe de baseball d'une université dans les trois jours qui précédent le début de l'année, et leurs tentatives de lever des meufs. Le film est donc extrêmement centré sur les personnages masculins, la jeunesse, l'identité culturelle... il pourrait être dérangeant si ce n'était pas quelqu'un de confiance comme Linklater aux commandes, pour ne pas dire ouvertement sexiste. Au contraire, le film est outrageusement réaliste : ayant fait partie d'une équipe de sport à l'université, je peux attester de la véracité de cette représentation non moralisatrice, mais qui reste clairement passéiste.

Hardcore Henry: Premier film d'action tourné entièrement en vue subjective, comme un jeu vidéo. Cette première phrase est en fait, assez fausse : Hardcore Henry ne mérite pas d'être appelé film, et il n'est pas "comme un jeu vidéo", il est exactement identique à un mauvais jeu vidéo. C'est bien simple, cette immondice est une insulte aux fans de jeux vidéos puisqu'il en prend la majorité des traits négatifs comme la linéarité et l'objectification de la femme, et conserve certains éléments qui hors d'un contexte de jeu vidéo n'ont plus aucun sens. La vue subjective par exemple : l'empathie est créé au cinéma par le fait de voir un personnage ressentir, pas par une interprétation littérale de "voir le monde comme il/elle le voit". Certes, certains passages spectaculaires sont intéressants et impressionnants, mais uniquement parce qu'on se demande comment ils l'ont fait, donc pas pour le film en tant qu'oeuvre. Infect, infect, infect.

High Rise: Adaptation du roman par un réalisateur qui commence à faire parler de lui ; c'est un film sur le futur du passé où on suit les nouveaux habitants d'un immeuble inspiré par la révolution architecturale Le Corbusier. A l'intérieur se mélangent la haute bourgeoisie, la petite et la classe d'en bas... sauf qu'ils ne se mélangent uniquement par le chaos, la baston, le sexe et la destruction. Je vais être clair, je n'ai aucune idée de comment parler de ce film ; il n'a aucune logique structurelle, pas d'évolution dramatique des personnages, c'est juste une sorte de spirale de démence sans aucune limite, où l'image et les mots défient le spectateur constamment. Exténuant pour certains, jubilatoire pour d'autres, je le recommande à tous ceux qui comme moi pense faire partie de la seconde catégorie. Ah oui j'oubliais : la première scène du film, c'est Tom Hiddleston qui mange un chien.