mercredi 28 janvier 2015

Into The Woods : Charmant, mais pas sincère

Ce mercredi sort en France la nouvelle adaptation musicale de Rob Marshall (surtout connu pour sa version cinéma de Chicago), Into The Woods, adaptée de la comédie musicale du même nom de Stephen "fuckin Genius" Sondheim et de James Lapine. Il s'agit d'une reprise de plusieurs contes des Frères Grimm dans une approche plus sombre, où les personnages se croisent et sont confrontés au désenchantement, à la mort du happy end: Cendrillon, Raiponce, Jack, le petit Chaperon rouge... des princes, une sorcière, et un triste couple qui veut à tout prix un enfant.


Et donc qu'en est-il de ce film ? Tout d'abord, il faut noter qu'une adaptation était en projet depuis longtemps, et c'est finalement Disney qui a eu le dernier mot. Ce qui veut donc dire que certains points narratifs et thématiques n'allaient certainement pas survivre à l'adaptation ; ce qui n'est pas forcément un problème en soi, toute bonne adaptation est une trahison après tout, mais c'est surtout une question de goût. Des morts affreuses, des passages outrageusement sexuels sont retirés, mais le ton, l'atmosphère du désenchantement persiste... un peu. Je fais parti de ceux qui auraient voulu voir le tout aller plus loin, tout comme j'aurais voulu voir certaines chansons rester dans le film ("No More", que chante le boulanger à la fin), pour leur impact émotionnel. Cependant de nombreux passages (dont trois nouvelles chansons composées par Sondheim) ont été coupés au montage, donc peut-être puis-je espérer une version longue plus riche ?


La musique est belle, l'instrumentisation est délicieuse et bien plus riche que celle de l'enregistrement de Broadway, les acteurs sont excellents (j'y reviendrai), les images sont plutôt belles et les effets numériques sont de très bonne facture. Bref, c'est "bien fait" quoi. Et c'est exactement ce que je reproche à la direction du film : tout est fait pour être joli, plaisant, mais sans jamais s'attaquer à la chair de l'oeuvre. Ce sont trente-six plans par minute, une caméra sans cesse - sans cesse ! - en mouvement sans aucune raison dramatique, des effets visuels dans tous les sens... c'est très flashy mais à aucun moment ou presque cela ne sert l'histoire et l'émotion qu'elle porte ! J'irai même jusqu'à dire que la direction de Rob Marshall dessert la musique de Sondheim, qui elle n'a jamais rien de "spectaculaire" au sens bas du terme.


Au contraire, Sondheim considère que la musique et les paroles doivent servir l'émotion, il ne fait pas d'artifices comme on peut entendre dans la majorité des comédies musicales (une montée d'un demi-ton sur la fin de la chanson pour démontrer les prouesses vocales des acteurs, des escaliers des graves et aigus, des démonstrations de technique...), il tente au maximum d'aller vers une authenticité, une vérité, et pour cela il faut, mon cher Rob Marshall, que tu poses ta putain de caméra, et que tu filmes tes acteurs en train de chanter plutôt que d'aller danser la valse avec ton optique !! Et puisque l'image amuse sans transmettre de message clair, le ton du film est très indécis. Cela peut (et c'est peut-être) un parti pris auquel simplement je n'adhère pas : les contes mélangés donnent lieu à des ambiances et des atmosphères différentes, allant de la farce la plus ridicule et surjoué au drame.


Et la forêt, personnage principal sous bien des aspects, semble tout droit sortie des films du Hobbit de Peter Jackson ; tout semble faux, et on se prend (je me prends ?) à rêver aux films de genre des années 80 qui utilisaient des vrais décors et savaient nous enchanter avec simplement cela, parce que cela semblait nouveau ET familier à la fois. Bref, pour que l'émotion naisse et embellisse le chant, j'attendais plus d'authenticité et moins de parade, ce qui est finalement, au vu du sujet du film, un assez gros contresens.


Malgré tout ! Je ne suis pas qu'un gros crevard, et il y a beaucoup de choses que j'ai pu apprécier dans le film. Pour n'en citer que deux : Meryl Streep et Chris Pine. La première, encore nominée aux Oscars pour sa performance, rappelle encore une fois que si c'est facile de blaguer sur son abonnement systématique à la cérémonie, elle le mérite sa maman en slip léopard ! Meryl Streep est vraiment ahurissante, et sa chanson avec Raiponce est un des rares moments réellement bouleversant du film. Quant à Chris Pine... je ne peux l'expliquer. Il faut le voir pour le croire... Le capitaine Kirk joue aussi le Prince Charmant, et il le fait avec tellement de surjeu et d'exagération qu'il est difficile de comprendre ce qu'il fait vraiment. Sans aucun doute une performance à voir, pour le croire.

Fin de l'article les poulets.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire