mardi 10 mars 2015

Vincent a des Ecailles : le super-héros qui n'est pas une poule mouillée

Commençons par ce qui fâche, parce que cela me paraît important et une fois que cela ferait, je pourrais expliquer pourquoi ce film défonce.


La promotion de ce film est globalement fondé sur une série de mensonges assez grossiers, visant à attirer un public. Tout d'abord, ce n'est pas "le premier film de super-héros français", puisqu'il y a eu des tentatives avant, sans parler du fait que Michel Gondry a réalisé le génial The Green Hornet avant. Et de plus, le film n'est pas "garanti sans effets numériques" comme l'explique la bande-annonce, et j'avoue que celui-ci fait un peu mal quand mon très bon ami le Commandant Rémus Bouh, infographiste, a travaillé sur le film en post-production.
Ceci étant dit, je comprends un peu la démarche. Il s'agit de montrer que c'est un film de super-héros pas comme les autres, bien de chez nous, et il est vrai que l'utilisation d'effets visuels non numériques dans le film fait preuve d'une réelle inventivité qui m'a fait jubiler à plusieurs reprises. Donc voilà, tout est dit, je comprends, mais quand même c'est un peu pas méga réglo.


Voilà, j'ai poussé mon coup de gueule, maintenant je peux le dire : j'ai adoré ce film. Après de nombreux courts-métrages, Thomas Salvador écrit réalise et joue dans un "long" (1h15) métrage qui présente un homme dont la force est décuplée quand il est mouillé. Oui, ça sonne totalement débile hein, mais primo ça n'est pas franchement bien différent d'un mec qui devient élastique suite à un accident nucléaire, et deuxio le film est totalement conscient du ridicule de la chose et en joue énormément. Sous bien des aspects, Vincent n'a pas d'écailles est une comédie. Mais pas de ce genre bien lourdingue et potache qui fait le succès du cinéma populaire français, non, c'est un style comique plus proche de celui de Bruno Dumont dans sa série Ptit Quinquin, c'est un jeu constant sur le rythme, la lenteur et les coupes abruptes.
 Il ne se passe presque rien dans ce film : le héros bosse sur un chantier, puis il va s'isoler dans la nature et se baigne dans un lac, là où il se sent bien. Il rencontre une fille, ils s'aiment. Il lui révèle ses pouvoirs, ils s'aiment. Des ennuis arrivent, et voilà. Chaque personnage du film est à peu près aussi loquace que Mad Max, ce qui fait que chaque réplique semble sortir de nulle part ; chacune à leur tour, elles brisent le silence avec une hésitation tordante. Et à côté de cette lenteur, chaque fin de scène quasiment (les scènes sont presque tous des plans fixes, pas de champ contre-champ, zéro bullshit l'image te raconte sa vie toute seule, sans manuel d'utilisateur) est extrêmement surprenante, très rapide. Cela donne une ambiance humoristique avec un côté touchant, voire attachant ; le pinacle du film de ce point de vue là est un montage totalement insensé où la copine du héros lui pose les questions que tout le public se pose depuis le début du film : et si tu mouilles juste ta main, ta main elle devient super forte ? Et s'il pleut ? 


C'est pour moi la grande réussite du film ; il parvient à raconter des personnages sans leur donner beaucoup d'histoires, vu qu'ils ne parlent presque jamais, et même comme ça le spectateur peut s'attacher à eux. Pour un film à petit budget, réussir une telle prouesse visuelle dans le langage cinéma, ça mérite le respect. Le petit couple est touchant, mignon, drôle, à la fois dans leurs maladresses et leur timidité, et leur confiance en soi dans leurs moments de vie privée (il y a une séquence de danse nue qui est absolument fantastique).


Quant à la partie super-héros du film, on pense évidemment au dernier bon film en date de Shyamalan, Incassable, notamment parce que la kryptonite de Bruce Willis est ici la source de la force du héros. Sauf qu'Incassable était vraiment centré sur la question de la nature des suer-héros, alors qu'ici il est difficile de considérer le film comme un modèle du genre. C'est ce qui aurait pu faire que le film se rate totalement, et pourtant c'est ce qui fait sa force : il est original et de la bonne manière. Tout en passant ici et là par les cases attendues, avec les phylactères qui correspondent : une jolie référence à Spider-Man et surtout une course poursuite à la fois drôle, prenante et surprenante entre notre héros et la police.


Vincent n'a pas d'écailles est un film surprenant, convainquant et charmant, et il mérite que l'on parle de lui. Ce que je viens de faire ! Elle est pas belle la vie ? Allez viens je t'offre un café. Tu ne bois pas de café ? Mais c'est une expression, café, chocolat, thé, tu prends ce que tu veux... un whisky ? à midi 15 ? Vraiment ? Bon bah ok... mais c'est bien parce que ta femme t'a quitté la semaine dernière hein !

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