jeudi 9 avril 2015

Fast and Furious 7 : Faste et Futile.

En sortant du cinéma, une question me taraude l'esprit. Ou plutôt, une question me roule dessus avec les chenilles en adamantium d'un tank nucléaire : mais POURQUOI est-ce que j'ai voulu voir ce film ? C'est le septième volet de la "saga", et depuis le tout premier je n'en ai apprécié AUCUN depuis le numéro 2... Alors pourquoi diable et diablotins ai-je voulu voir Furious 7 ? Parce que comme toujours depuis que le quatrième volet est sorti, je me suis laissé séduire par tous les nerds qui parlent du film comme un divertissement pur, absolument jouissif... Dan de The Nerdist a même été jusqu'à dire qu'il pourrait être le film de super-héros de l'année. Oui parce que depuis le 4 c'est des super-héros les mecs, oui oui, ils sautent de voitures sur la route à 150 km/h, se prennent des balles dans toutes les côtes sans grincer des dents, et se battent même contre des méchants britanniques (l'Angleterre, fournisseur officiel de méchant à accent à succès depuis 15 ans).


Seulement voilà, pendant que tout le monde s'extasie, je le crie haut et fort : ces films, c'est de la grosse merde. Comme ça c'est dit, je l'assume et tout le monde est content. Allez je vais même aller plus loin dans la provocation, mais le fait est que je le pense tout à fait : je préfère cent fois voir un film de Michael Bay que ça. Et vous savez pourquoi ? Parce qu'au moins les acteurs sont bons dans leur style chez Monsieur explosion-nichons. Michael Bay sait diriger une forme de surjeu qui sied si bien à son style, et la majorité de ses œuvres ont beau être criblés de défauts telle une voiture criblée de balles, elles fonctionnent tout de mêmes, telles les voitures criblées de balles de Fast and Furious. Justin Lin, et désormais James Wan, n'ont pas cette maîtrise, et en même temps vu la pauvreté affligeante des répliques à deux crottes de moineaux que balancent les costauds pendant tout le film, c'est difficile d'en tirer quelque chose... mais pas tant que ça ! Elles suintent tellement le script badass écrit par un gosse de 14 ans que pour s'en dépêtrer il faudrait essayer de varier le ton un peu, jouer sur l'autodérision. Dans le film, tout comme dans les trois précédents, il n'y a que deux manières de s'exprimer : en voulant être drôle mais sans aucun sens du rythme comique ou de l'intonation, ou en voulant être un gros dur et donc en s'exprimant lentement et avec emphase pour bien appuyer chaque mot stupide que l'on dit. Non, franchement si je vous dis que le meilleur acteur de Furious 7, c'est Kurt Russel, est-ce que ça vous donne envie de le voir... ?


Et ça n'a pas toujours été le cas. Pendant que tout le monde s'extasie sur une saga d'action qui est devenue du Mission Impossible bas de gamme, avec une grosse touche d'Expendables sans second degré aucun, tout le monde a l'air d'oublier qu'autrefois, en des temps révolus, il existait un film nommé The Fast and The Furious, et qu'il était bien. Qu'il avait été assez malin pour transposer dans un monde alors inconnu au cinéma (les courses de voitures illégales) une histoire que tout le monde connaît : le gentil héros infiltre un monde nouveau, se fait passer pour l'un des leur, découvre qu'en fait il s'y plait bien et ne sait pas comment ne pas les trahir. Ajoutez à ça un soupçon de "en fait c'est pas des gros méchants" à la Le Dernier Roi d'Ecosse avec évidemment le passage de la désillusion jusqu'à l'affrontement final et on obtient... Point Break mais avec des voitures. C'était un bon film de genre, le scénario tenait la route (haha), ça suintait l'amour des bagnoles, les acteurs se donnaient à fond et ça faisait rêver les gosses.

Hop on prend une prolepse inter-dimensionnelle et on arrive en 2015 ; Fast and Furious ne parle plus de voiture, mais d'une bande de potes surhumains qui aident des agences secrètes à lutter contre des criminels... en conduisant des caisses. Histoire de rester un minimum raccord avec la passion originelle des personnages... mais vraiment un minimum hein. D'ailleurs ce n'est pas pour rien que le film s'appelle Furious 7 en VO : clairement la franchise a changé d'orientation et rentre dans le moule des blockbusters tout calibrés tout lisses tout beaux tout propres, plutôt que de garder son originalité d'antan. Et pourquoi pas, vu que ça marche ?


Alors voilà, je déteste ces films, mais vu que tout le monde ne cesse de les encenser (allez juste pour vous faire partager ma douleur : le dernier film est actuellement à 8,1/10 sur IMBD, ce qui le place au dessus de, en vrac : Twelve Monkeys, Terminator, Les Dents de La mer, Monstres et Compagnie, Rocky, Barry Lyndon, Jurassic Park, Kingsman, La Belle et la Bête...), je me fais avoir. Et je pourrais m'arrêter là et dire que je déteste ces films, sans aller plus loin et passer à autre chose, mais non, parce que leur succès me dérange. Parce qu'un film transmet une vision du monde, des conceptions plus ou moins maîtrisées/conscientes, et que ce qu'émet un film comme Furious 7 me débecte au plus haut point. Le scénario débile et incohérent passe encore, mais ça... non.


Parce qu'au fond, qui va voir ce film ? Pas besoin de poser la question, je connais déjà la réponse, son public je le vois tous les jours. Ce sont des jeunes garçons, qui veulent voir des mecs trop classes conduire des grosses bagnoles et se taper des belles meufs, et c'est exactement ce qu'ils voient... et quel mal à cela ? Peut-être aucun, mais il y a réellement quelque chose qui me retourne l'estomac là-dedans. Car ces rebelles qui plaisent tant aux spectateurs, ce ne sont finalement que des fantasmes républicains (au sens du parti républicain américain, pas d'autre chose hein...) : des vigilantes qui sont plus forts que le gouvernement et la police, qui obéissent à leurs propres codes et valeurs morales, qui tiennent avant toute chose à la famille dans son système le plus patriarcal ... et puis bien sûr il y a les voitures. L'automobile, le symbole de la puissance américaine, celle de la grande et belle ville de Détroit ! Heu, enfin, vous me comprenez.


Et franchement, si ça en restait là, sans enfoncer le clou moi jveux bien ! Mais quand tu as des scènes où la femme de Paul Walker (enfin, Brian machin truc) dit à son frère (Vin Diesel, Toretto) qu'elle est de nouveau enceinte mais n'ose pas le dire à son mari parce qu'elle a peur de l'enfermer dans la vie de couple alors qu'il a ses potes avec qui il peut boire des bières et conduire des voitures... jsuis désolé mais ça fait un peu le fantasme du mec marié qui veut sa femme lui lâche la grappe quoi. Pour qu'il puisse aller mater des femmes objets qui se pavane... sans déconner, je reviens sur Michael Bay un instant, mais même lui n'y va pas aussi fort. On a quand même Nathalie Emmanuel qui dans le film joue une génie de l'informatique qui a mis en place un programme de renseignement similaire à ceux de la NSA (regardez Citizen Four), et qui n'a même pas droit à un minimum de character development, non non non à la place on va faire un plan au ralenti d'elle en maillot de bain à la plage. Et ouiii bien sûr elle est absolument sublime, tout ceux qui ont vu la saison 4 de Game of Thrones sont déjà au courant,  mais je sais pas donnez-lui un peu plus que ça, surtout que c'est elle et Michelle Rodriguez qui sont les rôles féminins principaux, et ça reste assez pitoyables, alors je ne parle même pas de toutes les autres qui sont vraiment traitées comme des objets... et oui, quand c'est fait sans second degré et d'une certaine manière, moi ça me débecte. N'est pas Robert Rodriguez qui veut, voilà. Et bien sûr, comment ne pas m'attarder enfin sur ce fameux programme de renseignement dont je parlais un peu plus tôt : cela permet ici au film de transmettre l'idée qu'un tel système permet d'arrêter Ben Laden en quelques heures, et également d'envoyer une petite pique au gouvernement en mode "malheureusement le président ne veut pas l'utiliser". Alors newsflash mon coco du Tea Party, ton président est bien plus axé Patriot Act que tu ne sembles le comprendre, il utilise déjà des systèmes de la sorte, non ils ne sont pas UNIQUEMENT dangereux quand ils tombent entre de mauvaises mains (et mauvaises mains, c'est déjà un concept assez absurde), et surtout, NON ils ne permettent pas de trouver des criminels en trente secondes chrono. Sorry Furious 7, mais parfois la faim ne justifie pas les moyens et là c'est l'indigestion.


Vous notez comment cette dernière phrase est débile ? C'est toutes les répliques du film qui sont comme ça ! Toutes ! Toutes ! Bordel de merde.

Sinon, y a deux cascades plutôt gigantesques, et l'hommage à Paul Walker, à la fin du film, bien qu'extrêmement maladroit et un peu... mal venu, m'a tout de même ému. Voilà.

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